Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Arts

Derrière le fils, le père...

par Elisabeth Bouvet

Article publié le 02/06/2008 Dernière mise à jour le 10/06/2008 à 15:29 TU

Victor Prouvé, <em>Vision d’automne</em> (1899)Musée de l’Ecole de Nancy. © ADAGP, Paris 2008

Victor Prouvé, Vision d’automne (1899)
Musée de l’Ecole de Nancy. © ADAGP, Paris 2008

Trois musées pour une exposition. Il est dit que le 150e anniversaire de la naissance de Victor Prouvé (1858-1943) ne passera pas inaperçu. Nancy, la ville natale du peintre, sculpteur et graveur français, a décidé de se « mobiliser » pour cet événement : les Beaux-Arts, le musée de l’Ecole de Nancy et le musée Lorrain ouvrent leurs portes à celui qui a sans doute souffert de la notoriété de son fils, l’architecte et designer Jean Prouvé. Or, et c’est bien le sens de cette redécouverte en 3 temps, Victor, le père, était un touche-à-tout à la fois fécond et talentueux. Aux Beaux-Arts, c’est le peintre qui est célébré, à l’Ecole de Nancy, dont il fut l’un des fondateurs, les arts décoratifs et au musée Lorrain, les affiches, illustrations de livres et autres couvertures de revues qui représentent aussi une part importante de son œuvre.

Point commun à ces différentes facettes, le dessin. Victor Prouvé est en effet un remarquable dessinateur, qualité qui lui permettra d’explorer tous les domaines artistiques et de travailler sur toutes les matières, du bois au cuir (on lui doit notamment de très belles reliures) en passant par les matériaux précieux - il réalisera des bijoux en collaboration avec le maître verrier Emile Gallé (1846-1904), l’un des pionniers de l’Art nouveau, un Nancéen comme lui -, et le verre, bien sûr. Si Victor Prouvé débute en peinture, son intérêt pour les arts décoratifs se révèle très tôt. Ce qui ne l’empêche pas de mener de front chacune de ses activités. Où l’on découvre un artiste peintre influencé par son époque : c’est en 1888, le premier voyage en Tunisie qui donne à sa palette une lumière nouvelle, puis c’est l’orientaliste qui succombe au symbolisme, un symbolisme « à la saveur tragique et à la tournure populaire », écrira un critique parlant de cette toile baptisé Vision d’automne. Mais le domaine d’excellence de Victor Prouvé demeure le portrait. Il met en scène sa famille – sa jeune femme Marie et ses 7 enfants -, ses amis proches et son cercle de connaissances où se croisent musiciens et intellectuels nancéens, ce qui, rétrospectivement, permet de « revivre » l’effervescence artistique qui fut celle de la ville lorraine, au tournant du XIXe et XXe siècle, de mesurer son dynamisme autour de l’influente Ecole de Nancy.

Victor Prouvé, <em>Coupe La nuit </em>(1894)Musée de l’Ecole de Nancy, C. Philippot. © ADAGP, Paris 2008

Victor Prouvé, Coupe La nuit (1894)
Musée de l’Ecole de Nancy, C. Philippot. © ADAGP, Paris 2008

Homme de son temps, Victor Prouvé l’est aussi quant à ses engagements. Pour preuve, son travail d’affichiste et d’illustrateur qui témoigne de son attachement aux valeurs d’humanisme et de solidarité. Il dessinera des programmes de bienfaisance au profit des poilus, des orphelins ou encore des sinistrés, et surtout défendra l’idée de « l’art pour tous » en illustrant notamment des livres destinés au plus grand nombre. De même, quand il prendra, en 1919, la direction de l’Ecole de Nancy, il initiera une série de concours pour encourager les rapports entre les jeunes décorateurs et les industriels lorrains. Cet engagement pour l’art et l’industrie fera l’objet de nombreuses conférences qu’il donnera avant de quitter la France, en 1940, pour aller s’installer à Sétif, en Algérie, où il décèdera trois ans plus tard.

Victor Prouvé, les années de l’Ecole de Nancy, à voir dans trois musées jusqu’au 21 septembre.