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Editorial politique

Hugo, Jospin et les autres

La France célèbre donc aujourd’hui le bicentenaire de la naissance de Victor Hugo. Lionel Jospin a exalté hier son progressisme ample et généreux. On sentait l’auto-portrait derrière l’hommage.

C’est l’un des exercices favoris des Français: la commémoration. Et n’en déplaise à Victor Hugo qui disait en son temps détester les anniversaires, «de stupides idées», c’étaient ses mots, la France replonge avec délectation dans ce bel unanimisme. Avec bonheur mais non sans arrière-pensées en cette année électorale. Chacun glorifie le grand homme, dans sa version consensuelle, républicaine et modérée, politiquement correcte. Facile car comment ne pas aujourd’hui voir un visionnaire en Victor Hugo? En toute chose, il fut un pionnier: la monnaie européenne, et les Etats-Unis d’Europe encore à imaginer, l’abolition de la peine de mort, la citoyenneté des femmes, le suffrage universel, l’instruction gratuite et obligatoire, la lutte contre la misère, toujours d’actualité. Alors, chacun le célèbre. Mais, en creux, comme toujours, chacun tente d’esquisser un parallélisme. On peut déceler un auto-portrait forcément valorisant.

Et cela est d’autant plus facile qu’ils sont plusieurs à pouvoir revendiquer une hypothétique filiation. Le parcours intellectuel et politique de Victor Hugo, ses choix spirituels autorisent des personnalités diverses à se reconnaître en lui. A gauche surtout, parce-que toute son évolution s’est faite dans cette direction. Lionel Jospin hier à Besançon a donc loué Victor Hugo, espérant que chacun verrait dans ses mots la continuité d’un positionnement, des ambitions communes. Les termes sont choisis. «Ce progressisme ample et généreux, qui exclut la hâte et la fixité; l’évaluation raisonnée du souhaitable et du possible qui lui fait haïr la raideur du système et des hommes et enfin ces valeurs qu’il sut réconcilier, fidélité et justice, pragmatisme et audace, tolérance et rigueur». La République de Victor Hugo serait, à en croire le Premier ministre, identique à celle, deux siècles plus tard, du candidat socialiste.

Pourtant, Jean-Pierre Chevènement au moins est en mesure de lui disputer cette filiation. Dans la préface d’un ouvrage consacré à l’écrivain, le candidat du pôle républicain vante le poète qui ne «fut en rien, à l’instar de tant d’autres, un républicain malgré lui, un républicain de résignation». Et d’écrire encore, comme en pied de nez à ses propres détracteurs que «la nostalgie peut être le ressort de l’invention».
Reste enfin Jacques Chirac dont l’hommage ne saurait tarder. Parce-que Victor Hugo fut aussi passe-murailles, pour le caractère paradoxal de ses engagements, pour son aisance à jouer de ses contradictions, pour cette ultime image rassurante de grand-père qui veut un sage, le président-candidat peut, aussi, y voir un inspirateur. Dans sa quête de la synthèse et du consensus.

par Geneviève  Goetzinger

[26/02/2002]

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