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Editorial politique

La grâce faite à Bové

Jacques Chirac a beaucoup réfléchi. La grâce est l'une de ses prérogatives, curieux reliquat de cette culture monarchique à laquelle reste attachée la République française. Mais cette fois, il n'avait en réalité que de mauvaises solutions. Grâcier José Bové, c'était céder à la pression, sembler accréditer l'idée qu'il suffit d'être médiatique pour bénéficier d'un traitement particulier. Se refuser à faire un geste, c'était à l'inverse se montrer insensible à la situation spécifique de José Bové, dont les délits s'apparentent à des actes de rébellion de nature politique, dont les préoccupations connaissent un retentissement réel dans l'opinion. Les conditions de l'interpellation du leader paysan avaient d'ailleurs déjà fait l'objet d'une polémique. Etaient ainsi contestés un déploiement de forces destiné en réalité à éviter une résistance très médiatisée de ses amis, et puis encore l'usage de l'hélicoptère pour son évacuation. Il visait à éviter le risque de voir l'escorte bloquée par un barrage de militants en colère.

Cette fois, Jacques Chirac a tranché par une demi-mesure. Mais à vouloir ne contrarier personne, il risque de ne pas satisfaire grand monde. Une partie de la remise de peine s'inscrit dans cette grâce collective accordée par le chef de l'Etat à l'occasion du 14 juillet, les deux autres mois faisant l'objet d'une grâce individuelle qui, conformément à la tradition, n'a pas lieu d'être motivée. Un geste envers ceux qui estiment que la punition était sévère et la peine grave. Surtout par comparaison avec l'impunité dont d'autres militants paysans ont pu bénéficier dans le passé. On se souvient bien sûr du saccage du bureau de Dominique Voynet demeuré impuni. Et pourtant, cette clémence relative apparait insuffisante à l'avocat et aux amis de José Bové. Ils ne voient qu'une chose: la mesure prise par Jacques Chirac ne dispensera pas le militant de la Confédération Paysanne de passer quelques mois en prison.

Mais à l'inverse cette décision de grâce partielle risque d'être incomprise par tous ceux qui adhèrent à la réthorique de la responsabilité et ne comprennent pas bien pourquoi José Bové en serait exempté. L'intéressé a d'ailleurs tout fait pour leur donner des arguments, refusant la moindre coopération avec la justice, prenant de haut la possibilité d'être tributaire de Jacques Chirac, redevable de sa liberté. L'indéniable érosion de la popularité de José Bové correspond d'ailleurs à une certaine lassitude face à ses excès. Jacques Chirac ne s'est pas arrêté à cela pour prendre une décision soigneusement pesée et au final peut-être trop balancée pour susciter la moindre adhésion.

par Geneviève  Goetzinger

[11/07/2003]

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