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Colombie

Les Farc, actives depuis 40 ans

Un défilé des Forces armées révolutionnaires colombiennes (FARC). 

		(Photo : AFP)
Un défilé des Forces armées révolutionnaires colombiennes (FARC).
(Photo : AFP)
Les Forces armées révolutionnaires colombiennes (Farc) ont 40 ans. C'est la plus vieille guérilla d'Amérique latine. Ni l’action militaire, ni les tentatives de négociation menées par les présidents successifs n’en sont venues à bout. Et leur capacité militaire est intacte.

Les circonstances, très circonscrites, de sa création ne laissaient pas présager une telle longévité. Ce que les Farc célèbrent, si l'on peut dire, en ce 27 mai, c'est un peu ce qu'on pourrait appeler leur mythe fondateur. Il y a quarante ans, vivaient sur un plateau du sud de la Colombie, dans la zone de Marquetalia, un petit groupe d'hommes et de femmes. Ils étaient 48, qui s'étaient constitués en foyer, en foco, communiste, groupe à la fois d'autogestion et d'autodéfense paysanne. Cette date du 27 mai correspond à l'attaque de ce groupe par les militaires colombiens, à leur fuite dans la montagne où ils ont pris le maquis et, de fait, à leur transformation en une guérilla efficace et mobile, inspirée de la révolution cubaine qui avait triomphé quelques années plus tôt à La Havane.

 A mesure que le temps passe, les Farc élargissent leur base. A leur débuts, elles avaient trois ou quatre zones de prédilection, trois ou quatre enclaves, dans la partie méridionale du pays, mais aujourd'hui elles sont présentes à des degrés divers sur presque tout le territoire colombien. Elles ont en tout cas des représentations, des directions et des unités clandestines dans 31 des 32 départements colombiens. Avec  toujours le même chef, celui qui avait pris la direction des opérations il y a 40 ans, Pedro Antonio Marin, dit Manuel Marulanda, dit Tirofijo, autrement dit, «tir précis» ou «dans le mille». Agé aujourd'hui de 73 ans, les autorités ont déjà annoncé 17 fois sa mort, mais il réapparaît toujours. De fait, les Farc contrôlent des régions entières. Elles comptent aujourd'hui 17 000 combattants, une véritable armée engagée dans des affrontements avec l'armée nationale ou les paramilitaires et à l’origine d’attentats ou autres actions. Aucun gouvernement colombien n'a réussi à les réduire. Et ce n'est pas faute d'avoir tenté et d'avoir fait usage alternativement de la carotte et du bâton. Cinq présidents, en 40 ans, ont essayé de négocier la paix avec les Farc, et en dernier lieu Andres Pastrana, prédécesseur de l'actuel président Uribe, qui était allé très loin dans les concessions, puisqu'il leur avait accordé une vaste zone dite démilitarisée, autrement dit gouvernée par les Farc qui n'en continuaient par moins leurs actions. Aujourd'hui Alvaro Uribe est au contraire engagé dans une phase de répression. Et les FARC sont devenues très impopulaires.

 Sombres perspectives

 Ce qui explique la longévité de cette résistance c'est tout d'abord la nature du terrain où elles ont installé leurs bastions. Des zones de forêts montagneuses d’où elles sont vraiment indélogeables. Et puis les Farc sont relativement riches. Elles se constituent un trésor de guerre permanent en taxant d'abord les populations qui sont sous leur contrôle, les entreprises, les mairies, voire des gouvernements régionaux qui préfèrent payer plutôt que risquer des représailles. Le racket ou l'impôt révolutionnaire, selon la perspective. Et surtout cette guérilla marxiste est impliquée dans le trafic de drogue. A grande échelle, disent les autorités colombiennes qui prétendent que les Farc sont le premier cartel de la drogue colombienne qui inonde les Etats-Unis. D'où d'ailleurs l'aide très substantielle qu'apporte Washington à Bogota. Même s'il n'est pas toujours facile de savoir si les Farc se contentent de prélever leur dîme sur la cocaïne ou s'ils contrôlent vraiment la chaîne de production. Et puis il y a les otages, très rarement politiques, la plupart du temps retenus seulement dans l'espoir d'une rançon, et qui sont donc un marché très lucratif, puisque les Farc en auraient détenu plus de 4 000 en deux décennies; et qu'elles en auraient toujours quelque 1 600.

 Les perspectives sont plutôt sombres, chacun campant sur ses positions sur un possible échange humanitaire entre les otages des FARC, dont Ingrid Bétancourt, et les membres des Farc emprisonnés en Colombie. Quoique Alvaro Uribe ait paru un peu mieux disposé sur cette question. Il doit, par exemple, rencontrer Jacques Chirac lors du sommet de Guadalajara vendredi, la France s'étant proposée pour accueillir quelques-uns des guérilleros qui pourraient être libérés à l'occasion d'un tel échange.



par Michèle  Gayral

Article publié le 27/05/2004 Dernière mise à jour le 27/05/2004 à 14:32 TU