par Danielle Birck
Article publié le 08/11/2007 Dernière mise à jour le 08/11/2007 à 21:32 TU
« C’était assez réjouissant de constater qu’en invitant un créateur de mode, il n’allait pas répondre par un narcissisme développé, mais justement par l’inverse : une carte offerte à toute l’histoire de la mode ». Ces propos sont ceux d’Olivier Saillard, responsable de la programmation au musée de la Mode et du Textile et commissaire de l’exposition Christian Lacroix, Histoires de mode. Invité à devenir, le temps d’une exposition, le conservateur qu’il n’a jamais été – il a raté le concours en 1976 – Christian Lacroix a tout de suite souhaité s’immerger dans les collections du musée pour en extraire « des joyaux, des pièces allégoriques de ‘son’ histoire de la mode ». Résultat : une sorte de musée imaginaire de Lacroix qui a permis au musée réel d’extraire quelque 500 costumes de ses immenses réserves qui en comptent plus de 80 000. Plus de la moitié des modèles exposés sont d’ailleurs montrés pour la première fois au public.
Curiosité boulimique
Pressé par les caméras de télévision en ce jour d’inauguration de l’exposition, Christian Lacroix ne révélera pas où se trouvent les entrepôts qui abritent ces réserves du musée, un « endroit secret défense, quelque part en banlieue », dira-t-il. Il y est venu, précise Olivier Saillard, « tous les vendredis pendant presque un an et demi, regarder chacune des 80 000 pièces avec une boulimie de curiosité qui lui ressemble et qui ne s’est jamais tarie », alors que souvent les créateurs ou designers qui viennent dans les réserves, d’abord séduits, « sont vite submergés, voire mal à l’aise ». Rien de tel avec Christian Lacroix : « quand on avait terminé de voir les vêtements, il voulait voir les broderies, après les broderies, c’était les chapeaux, et je pense qu’on aurait pu continuer avec le mobilier de la réserve des Arts décoratifs qui était juste à côté ! »
Une recherche pleine d’enseignement aussi, car, pour Olivier Saillard, Christian Lacroix est un des couturiers qui possèdent le mieux l’histoire du costume, dont il a « la connaissance, le vocabulaire, mais aussi la sensation en tant que créateur. Il sait parfaitement faire la différence entre une manche 1865 et 1868 »… Connaissance plastique également : « il sait dans quelle œuvre, quel tableau on peut retrouver tel type de robe ». C’est d’ailleurs pourquoi les organisateurs de l’exposition ont tenu à ce que Christian Lacroix signe lui-même les textes des panneaux qui accompagnent chacune des thématiques déclinées au fil d’une trentaine de vitrines : couleurs, motifs, textures, sources d’inspiration, ou encore « historicisme » …
Historicisme |
« Dès l’âge de six ans j’ai pris l’habitude et le soin de répertorier scrupuleusement en dessins commentés, le moindre changement dans l’histoire de la mode. J’entretenais le souhait fou de lister chaque modification d’ourlet, chaque évolution de manche […] Je voulais devenir costumier avant de devenir couturier. Le film de Visconti, le Guépard, fut une véritable révélation de ce point de vue là. […] Plus qu’un siècle en particulier, c’est le changement, le basculement d’une mode à l’autre qui m’a toujours passionné. L’historicisme, le recours à l’histoire comme une marque de fabrique de la mode, le retour accéléré des modes passées plus on avance dans le XXe siècle, ont guidé, construit mon travail […] J’aime le XVIIIe siècle vu ou revu par les années 50, les années 40 regardées par les années 80, le filtre d’une époque sur l’autre plus que l’authenticité supposée d’une décennie que l’on ne peut plus vérifier, tout vêtement étant un hybride, un costume de costume ». |
D’où ce regard attentif, à la fois savant et amoureux, sur la mode des autres, tous ces « camarades modeux », dit-il en parlant des couturiers, des créateurs qu’il a généreusement conviés à cette exposition, des très connus ou des moins connus et qui mériteraient de l’être plus comme Mainbocher. Une maison de couture française puis américaine, fondée en 1929, et que Lacroix a découverte au cours d’un voyage aux Etats-unis en 1970 et qui a réveillé en lui « le sentiment gustatif (qu’il avait) enfant à l’égard des couleurs ». Une vitrine, « Au couturier méconnu », lui est consacrée dans l’exposition.
Christian Lacroix « historien », certes. Mais qui évoque aussi son « romantisme » et confie avoir été « ému par les auréoles de transpiration » laissées au creux des manches de certains costumes du passé…
Patchwork
Ensemble deux pièces, Yohji Yamamoto, automne-hiver 2003-2004.
© Musée de la Mode et du Textile, coll. Les Arts décoratifs
De l’hybride au patchwork et au Kitsch, il n’y a qu’un pas que Christian Lacroix franchit allégrement et assume : « Mon mauvais goût de toujours », écrit-il. Un « mauvais goût » avec lequel il a, de son premier défilé en juillet 1987 à la dernière collection printemps/été 2008, conquis sa place dans le monde de la mode, avec un style qui s’est imposé par son originalité, une singularité née précisément du mélange de la référence personnelle et historique. Un patchwork, de couleurs, de matières ou d’époques, qui s’est imposé à lui dès ses années chez Patou, où il entre en 1981 pour relever le défi de la haute couture, et qui reste l’une de ses inspirations récurrentes. Il verra d’ailleurs son travail chez Patou récompensé par un « Dé d’or » en 1986, avant qu’un second ne vienne couronner sa propre maison de couture, dès sa deuxième collection, en 1988.
Très vite, à partir du milieu des années 1990, Christian Lacroix commence à diversifier son activité en signant des costumes de scène pour le théâtre et l’opéra. Ses costumes pour Phèdre en 1996, et pour Cyrano de Bergerac, en 2007, sont récompensés par deux « Molières ». Ce sera ensuite les uniformes d’Air France, le design des intérieurs des TGV, la future ligne 3 du tramway à Toulouse, la couverture et les lettrines du Petit Larousse, des meubles, la décoration de l’hôtel « le Bellechasse » à Paris …Entre temps il aura publié quelques livres. On ne s’étonnera pas que les deux compilations de ses musiques préférées sorties en 2003 et 2005 soient intitulées Patchwork…
Lors de l’inauguration de l’exposition, Christian Lacroix déclarait que celle-ci était « un tremplin ». On l’a aussi entendu dire : « je passe la main »… Alors ? « C’est quelqu’un qui réfléchit, qui pose les choses, et sans doute que ce travail ‘ intelligible ‘ d’aujourd’hui est aussi une sorte de bilan pour aller voir ce que l’on peut devenir, après tout ce travail effectué, commente Olivier Saillard. En tout cas, je ne doute pas que cela fait nourriture pour lui »…
portrait
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