par Danielle Birck
Article publié le 24/10/2008 Dernière mise à jour le 14/11/2008 à 11:48 TU
« Un bonheur et un plaisir » : ce sont les premiers mots de Gilles Marchal, quand on lui demande ce qu’est le chocolat pour lui. Bonheur et plaisir qui se confondent avec son métier, qui lui permet « de faire plaisir aux autres en réalisant des pâtisseries exceptionnelles aux goûts subtils, toujours équilibrés ».
Haute couture et prêt à porter
Pour lui, le chocolat devrait entrer dans le domaine de la gastronomie, au même titre que la truffe, le foie gras ou éventuellement le caviar, « à la différence près que le chocolat doit être accessible à tous, c’est pour moi très important », insiste-t-il. Précision qui s’impose : la Maison du Chocolat - où il a été appelé il y a deux ans pour y remplacer son fondateur et directeur de la création, Robert Linxe – fait partie du Comité Colbert, qui regroupe quelque 70 maisons de luxe françaises.
Et d’expliquer que la confection « de pièces exceptionnelles qui n’ont pas de prix pour des gens très fortunés dans le monde », c’est ce qui permet de développer de nouvelles techniques qui vont pouvoir être appliquées dans une fabrication davantage « prêt-à-porter », si tant est qu’on puisse « comparer notre métier d’art à celui d’un grand couturier ». Un métier que Gilles Marchal aime aussi comparer à celui d’un vigneron qui « par des mélanges bien à lui, avec un goût qui est le sien et sa personnalité, va réussir à développer un parfum spécifique à tel vin ». Et de conclure : « pour moi, le chocolat c’est tout cela »…
C’est aussi « un travail d’équipe » tient-il à préciser, avec quelque 30 chocolatiers, 15 pâtissiers en atelier, dans une entreprise qui reste « à taille humaine », en dépit de l’importante logistique qu’impose l’implantation de boutiques en Europe, aux Etats-Unis et en Asie.
Saveurs d’enfances
De son enfance en Lorraine, Gilles Marchal garde le souvenir des fêtes célébrées en famille autour d’une table, des tartes aux mirabelles, avec les fruits tout frais tombés de l’arbre, des gâteaux à la crème de lait, avec le lait rapporté de la ferme… autant « d’effluves odorantes », et de produits « cuisinés avec amour ». Une éducation des sens et du goût mais aussi une rencontre à 12 ans avec le boulanger du village qui lui propose de venir l’aider à « faire des gâteaux ». Une expérience qui va lui donner « envie de faire ce métier. L’envie, pas la passion », précise-t-il. La passion viendra un peu plus tard, auprès du grand pâtissier Claude Bourguignon à Metz, avec qui il parfait son apprentissage …
Diplômé à 17 ans « pâtissier chocolatier confiseur glacier », Gilles Marchal est désormais « sur les rails », sur un chemin « qui n’a rien de caillouteux », précise-t-il. Rencontres et expériences dans des lieux d’exception vont en effet se succéder, de Luxembourg, où il réalise ses premières créations, au Bristol à Paris, où il restera huit ans. « Huit années exceptionnelles », souligne-t-il, au cours desquelles l’établissement décrochera une deuxième étoile Michelin et lui-même le titre de Chef pâtissier de l’année en 2004, « toujours avec cette envie de faire de la fraîcheur, de la qualité, de la recherche gustative, visuelle… »
Artisanat d’art
Car les rencontres sont aussi celles de pays, de couleurs, de saveurs, de sensations nouvelles, grâce à un métier qui le fait voyager, l’amène dans des plantations au Mexique, à Trinidad, à Madagascar ou au Ghana. Sans oublier le Népal, où les poivres et poudres de piments du marché de Katmandou l’ont fasciné…
"Jamais je n'aurais imaginé voyager autant avec le métier de pâtissier chocolatier..;"
Un métier que Gilles Marchal définit comme un « artisanat d’art », lequel commence par la sélections des meilleurs produits, « ce qui ne veut pas dire les plus chers », tient-il à souligner, mais qui est aussi l’occasion de mettre en avant le travail de petits producteurs. Deuxième exigence : « le respect des produits en ne les transformant pas trop pour conserver le maximum d’arômes». Ensuite, et seulement ensuite, après avoir acquis les fondamentaux, au bout de quelques années, « vous pouvez vous permettre de rajouter au très bon du très beau ».
Et pour le « très beau », il faut dire que le pâtissier chocolatier jouit d’un avantage certain avec ces matières éminemment plastiques que sont le sucre et le chocolat : « le sucre qui peut être travaillé, cuit comme du caramel, coloré, qui peut être soufflé, coulé, tiré (…) et la matière chocolat qui, en plus d’être bonne, peut se travailler à l’infini, qu’on peut couler, gratter, brosser, sculpter »… Des métamorphoses qu’on peut admirer dans le livre de recettes que vient de publier Gilles Marchal [1] où, aux côtés des traditionnels éclairs ou tartes, on trouve par exemple un sac à main en scoubidous de chocolats! Une réminiscence des défilés de couture organisés au Bristol du temps où il y était chef pâtissier…
Et d’ailleurs le Salon du chocolat commence chaque année par… un défilé « Tendances » avec des mannequins vêtus de robes et accessoires en chocolat ! 27 modèles pour cette édition 2008, où Gilles Marchal et son équipe de création seront présents avec un modèle réalisé en collaboration avec la maison Boucheron, le joaillier qui fête cette années ses 150 ans.Un petit grain de folie ?
Oui, avoue Gilles Marchal, mais sans jamais oublier « qu’avant tout le plaisir est gustatif et que la matière chocolat doit être là comme un aliment normal, de la terre ; ce que les Aztèques ont bien compris, qui le mettaient dans toutes les sauces, y compris salées. Et qu’aujourd’hui encore, dans ces pays d’Amérique du sud, le gruau de cacao, qui est la fève torréfiée, séchée et concassée, est utilisé sur des poissons grillés ou des viandes, dans des sauces. En France, dans les périodes de gibier, comme en ce moment, on adoucit la sauce avec un carré de chocolat noir ».
Retour aux sources, en quelque sorte, car, en fait, le chocolat, pour Gilles Marchal, avant d’avoir une connotation de gourmandise sucrée, « est avant tout un épice ». Et de rappeler qu’avant d’être transformé en tablette par les couverturiers, « c’est avant tout une fève, comme une fève de café, qu’on peut concasser et utiliser comme un épice ».
D’où, sans doute, sa prédilection pour le « chocolat noir » qu’il fait partager à ses enfants de deux, cinq et dix ans ! Mais, qu’on se rassure : sans exclusive…
La Ganache |
La ganache, c’est « cette partie crémeuse à l’intérieur d’un chocolat », autant dire l’élément essentiel, le cœur du chocolat, mais aussi de l’atelier de fabrication où le mélange de la ganache constitue « le poste primordial, le poumon ». Simple a priori, puisque la ganache est « un mélange de crème bouillie sur du chocolat » - auquel on peut aussi ajouter du beurre pour la rendre encore plus onctueuse - la difficulté réside dans « l’équilibre des arômes » qui vont lui être associés : caramel, cannelle, menthe, etc… avec des variations à l’infini où la créativité du chocolatier va pouvoir s’exprimer. Ce « cœur » sera en suite recouvert de chocolat, noir ou au lait. Equilibre réussi, cela veut dire un dégagement progressif des arômes en bouche, avec une note finale chocolatée…
Gilles Marchal"le mélange de la ganache, le poste primoridal, le poumon de l'atelier de fabrication ..." |
portrait
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