par Dominique Raizon
Article publié le 24/03/2007 Dernière mise à jour le 24/03/2007 à 18:48 TU
Un médecin reçoit une patiente atteinte de tuberculose dans un hôpital kenyan près de Nairobi.
(Photo: Reuters)
Le rapport de l’OMS estime que le pourcentage de la population mondiale touchée par la tuberculose a atteint un pic en 2004, puis s’est stabilisé en 2005. Les régions du monde les plus affectées restent l’Europe de l’Est, l’Afrique et la Méditerranée orientale. En revanche, les Amériques, l’Asie du Sud-Est et le Pacifique occidental «sont désormais en bonne voie d’atteinte de leurs objectifs du plan mondial 2015 de réduire de moitié le nombre de cas de tuberculose et de décès dûs à la maladie», selon l’OMS. Globalement donc, les taux d’infection se stabilisent dans toutes les régions : la maladie a tué un million six cent mille personnes en 2005 contre un million sept cent mille l’année précédente. Cette stabilisation est encourageante mais il reste beaucoup à faire pour parvenir à réduire de moitié le nombre de décès d’ici 2015, objectif du millénaire.
«Il faut mettre en œuvre de nouvelles stratégies pour le traitement de la tuberculose et multiplier les efforts de recherche [face aux formes multirésistantes]», affirme le président de Médecins sans frontières (MSF), Jean-Hervé Bradol. Et, selon lui, «l’OMS a un rôle de tout premier plan à jouer dans ce domaine», pour que soient améliorés les campagnes de vaccination ainsi que les tests de dépistage, et pour accélérer la recherche de nouveaux médicaments, mieux adaptés.
55% des malades respectent la totalité du traitement
La lutte contre la maladie est rendue compliquée par l’émergence de formes ultra-résistantes aux médicaments, et par le lien avec le VIH-sida. L’OMS estime que cinquante pour cent des séropositifs sont atteints de tuberculose, ce qui place cette pathologie au premier rang des maladies opportunistes liées au sida. Or, témoigne le docteur Liesbet Ohler, qui travaille pour MSF dans un bidonville près de Nairobi (Afrique) : «Traiter simultanément la tuberculose multirésistante et le sida est une tâche très ardue à cause des interactions entre les médicaments et les nombreux effets secondaires, sans parler de tous les comprimés que les patients doivent prendre quotidiennement».
«La situation de la tuberculose en Afrique est une urgence.»
Résultat : seule un peu plus de la moitié des malades (55%) a suivi la totalité du traitement prévu sur 18 à 24 mois ; les autres sont «décédés ou ont abandonné le traitement à cause des effets secondaires, de l’isolement [manque de suivi médical] et de la mauvaise tolérance aux médicaments», précise l’ONG. Mais en interrompant leur traitement, les malades développent une tuberculose ultra-résistante dont la propagation menace de compromettre, désormais, les progrès réalisés en ce qui concerne la stabilisation de l'épidémie. MSF assure avoir traité, depuis 1999, quelque 570 patients souffrant de forme de tuberculose multirésistante à tout traitement existant, en Arménie, en Géorgie, en Ouzbékistan, au Cambodge, en Thaïlande, et en Ouganda.
La recherche a besoin de cinq fois plus de moyens
Pourtant, si cette maladie est mortelle, il est possible d’en guérir. L’intérêt du dépistage précoce est double : il permet d’optimiser les chances d’efficacité des traitements et de freiner la propagation d’une maladie au demeurant fortement contagieuse. Mais, le rapport révèle que les tests de dépistages sont insuffisants : «Le dépistage du VIH est de plus en plus pratiqué chez les tuberculeux en Afrique mais peu de personnes vivant avec le VIH sont soumises à un dépistage de la tuberculose». Par ailleurs, le type de test de dépistage le plus utilisé, mis au point il y a plus de cent ans, repose sur l’analyse de crachat au microscope. Une technique qui ne permet de dépister que 45% à 60% des cas de tuberculose : l’OMS déplore «des installations de laboratoire inadéquates et un manque critique de personnel de santé dans les pays les plus fortement touchés par la tuberculose».
L’organisation humanitaire insiste : «En dépit de l’urgence de la situation, les recherches actuellement menées ne sont pas à la mesure des besoins en nouveaux tests, en nouveaux médicaments et en nouveaux vaccins, et le financement de la recherche sur la tuberculose est «très insuffisant». En effet, deux cent millions de dollars sont actuellement investis dans la recherche tandis que les besoins sont estimés à quasiment cinq fois plus, soit neuf cent millions par les experts sanitaires.30/11/2006 à 20:01 TU