par Agnès Rougier
Article publié le 08/04/2008 Dernière mise à jour le 11/04/2008 à 15:04 TU
Oeuf
© The Future is Wild Limited - Pictural Charts Educational Trust- O. Héral - Parc du Futuroscope
Apprendre en s’amusant, c’est l’objectif de cette attraction, et ça marche : pendant 6 minutes, nous traversons le temps en train, d’abord 5 millions d’années, 100 puis 200 millions d’années, à la rencontre de créatures imaginaires, mais scientifiquement évoluées. Grâce à la technologie en 3D de réalité augmentée, les baboukaris, lapins-pika, caracoureurs et autres fous-baleines s’animent alors devant nous et bondissent sur nos genoux…
Mais que pourrait devenir la Terre dans cinq puis 500 millions d’années ? Le premier travail consiste donc à anticiper les mouvements des continents et les changements climatiques. Pour ce faire, les scientifiques ont commencé par étudier le passé, la tectonique des plaques, et ils ont lu, dans les glaces, l’histoire des climats au cours des ères passées. Les biologistes ont relié l’évolution des êtres vivants à ces différents paramètres. En croisant ces informations, ils ont « inventé » ensemble les fruits de l’évolution future.
Les moments charnières du passé
Les scientifiques ont ainsi déduit de leur études géologiques et glaciologiques que la planète subirait une nouvelle ère glaciaire dans 5 millions d’années (MA). La glace pourrait donc recouvrir de nouveau l’Europe.
La tectonique des plaques poursuivant son activité, les continents vont continuer à se mouvoir, jusqu’à se rapprocher, d’ici 200 millions d’années pour constituer de nouveau, à l’image de la Terre primitive, il y a quelques 900 millions d’années, un seul continent et un seul océan, géants.
Les biologistes et les paléontologues se sont penchés sur les moments charnières du passé. Ils en ont étudié la faune et la flore, puis ils ont cherché à relier les animaux du passé et du présent dans de grandes lignées évolutives. De là, ils ont tiré des lois, qui leur ont permis de prolonger ces lignées vers l’avenir, et d’extrapoler.
Suceur-sauteur
© The Future is Wild Limited - Pictural Charts Educational Trust - Parc du Futuroscope
Un escargot sautant comme un kangourou
Les changements de ces lignées évolutives sont avant tout liés aux modifications climatiques et d’écosystèmes, comme, par exemple, la perte d’un habitat. Ces évolutions sont principalement dépendantes de l’environnement. Dans le passé, des groupes d’animaux ont conquis des niches écologiques, quand d’autres se sont éteints.
Ainsi, l’oisson, une version extrapolée du poisson volant, pourrait quitter le milieu marin pour conquérir les airs. A l’inverse, le fou-baleine est un fou-de-bassan dont les ailes se transformeraient en nageoires, pour devenir un poisson ! Quant au suceur-sauteur (le sauteur du désert en anglais), ce serait une espèce née de l’évolution de l’escargot et qui sauterait sur un pied comme un kangourou… !
Oissons des forêts
© The Future is Wild Limited - Pictural Charts Educational Trust - Parc du Futuroscope
Une disparition des mammifères et des vertébrés
L’animal préféré de Christiane Denys, paléontologue et biologiste, qui a collaboré à l’élaboration des animaux du Futuroscope, est l’immense tortunausaure, une tortue qui a traversé le temps. La tortue vivait déjà il y a 200 millions d’années, avec les reptiles mammaliens et les pré-dinosaures. L’ancêtre tortue a donc traversé le tempsans beaucoup évoluer, en s’adaptant facilement aux changements de climats ou de milieux. Et si la tortue est restée présente quand les dinosaures ont disparu, les scientifiques en concluent qu’elle saura probablement s’adapter à la disparition des mammifères ! Son atout ? C’est sa carapace, la caractéristique qui lui permet de résister aux prédateurs.
Christiane Denys le fait remarquer : « S’il y a des contraintes évolutives, il peut y avoir néanmoins des innovations morphologiques difficiles à prédire, et des mécanismes de l’évolution que l’on ne connaît pas encore bien. Tout n’est donc pas prévisible… Pourtant, selon toutes probabilités, d’ici 500 millions d’années, les mammifères et les vertébrés auront disparu, donc l’Homme avec, et ce sont les insectes qui prendront le dessus ! »
La technique au service de l’évolution… et du spectacle
Seule la technologie de la réalité augmentée permet ce voyage dans le futur. Le principe de la réalité augmentée, comme l’explique Bruno Uzzan, créateur de la société Total Immersion qui a développé cette technique, « c’est de mélanger en temps réel des images vidéo et des images de synthèse en 3D. Des objets-animaux en 3D sont intégrés directement à ce que voit le spectateur, et c’est comme si le spectateur de Jurassic Park se promenait au milieu des dinosaures, en choisissant l’angle de la caméra ».
« La réalité augmentée existe depuis 25 ans, mais elle s’est beaucoup démocratisée ! Là où les 300 ordinateurs de Spielberg [(pour Jurassic Park] calculaient pendant 12 mois, ajoute-t-il, la réalité augmentée mise au point par Total Immersion est générée aujourd’hui avec un simple ordinateur personnel, et le calcul est en temps réel ».
Les jumelles sont aussi des caméras
Une paire de jumelles et un capteur sur la main droite, le voyageur embarque pour le futur. Installé dans le train, la barrière de protection fermée, il part alors à la conquête de l’avenir, désorienté dès le premier arrêt par un décor hors du temps : celui du passé ou du futur ? Il lui suffit alors de regarder dans les jumelles, pour que la scène s’anime : un caracoureur traverse le décor. En avançant la main droite, celle du capteur, il peut jeter une espèce de noix à une bande de baboukaris, de drôles de singes à face humanoïde.
En réalité, les jumelles sont aussi des caméras, qui capturent le mouvement du spectateur. Un ordinateur calcule ce qui change dans le champ de vision, et y insère les animaux en 3D qui sont stockés sur l’ordinateur, suivant un scénario prévu à l’avance.
Bien sûr, à la sortie, les enfants regrettent de ne pas avoir eu la possibilité des toucher : « c’est dommage, on ne peut pas les caresser » ! Pourtant, quand un oeuf éclôt dans la main, la sensation n’est pas loin …
S’amuser ou apprendre ?
La finalité de l’attraction est bien d’exciter la curiosité et parler de l’évolution, et tant mieux si ça marche, parce que le questionnement est la base de la pensée scientifique.
En quittant le train, le visiteur débarque dans une salle appelée « postshow », où il découvre certains des animaux, comme le tortunosaure, à l’échelle 1, réalisés en animatronics, robots sonores et animés.
John Adams, l’auteur de ces animaux du futur, déclare avec enthousiasme : « Je les avais imaginés, ils les ont fait vivre, c’est extraordinaire ! », concluant : « Je veux que les gens rentrent chez eux et regarde le chat de la famille avec un autre œil, comme le fruit de l’évolution ». Qu’en pensent les chats ?
Pour en savoir plus :
Site du Futuroscope
Les 3 documentaires en DVD,The future is wild, de John Adams, sont disponibles sur le site, en anglais
Précisions sur la réalité augmentée, cliquez ici
Société de développement de la réalité augmentée sur le projet du Futuroscope (cliquez ici)
A lire :
- Après l’homme, les animaux du futur, Editions Nathan, Dixon Dougal
- Sauvages ! les animaux du futur, Editions Nathan
- Le n° 223 d’avril 2008 de Sciences et vie JuniorA écouter
« Rencontre avec les animaux du futur comme si on y était. »
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