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Proche-Orient

Sharon prend sa revanche sur le Likoud

Le Premier ministre Ariel Sharon (D) avait obtenu le soutien du chef de l'opposition travailliste Shimon Peres (G) pour son plan de retrait de la bande de Gaza débattu à la Knesset fin octobre. 

		(Photo : AFP)
Le Premier ministre Ariel Sharon (D) avait obtenu le soutien du chef de l'opposition travailliste Shimon Peres (G) pour son plan de retrait de la bande de Gaza débattu à la Knesset fin octobre.
(Photo : AFP)
La majorité des quelque 3 000 membres du comité central Likoud s’est finalement prononcée jeudi soir en faveur du projet du Premier ministre de former une coalition gouvernementale avec l’opposition travailliste. Ce revirement des likoudistes qui, il y a trois mois encore, s’étaient massivement opposés à une alliance avec le parti de Shimon Peres devrait permettre à Ariel Sharon d’éviter non seulement la tenue d’élections législatives anticipées mais surtout d’ouvrir la voie à une alliance élargie qui facilitera la mise en œuvre de son plan de retrait de la bande de Gaza.

Ariel Sharon peut se délecter de sa victoire. Sur les 2 266 membres du comité central du Likoud qui ont participé à la consultation de jeudi, 1 410 –soit 62% des votants– se sont clairement prononcés en faveur de sa proposition de former un gouvernement d’union nationale. Une belle revanche pour un chef de parti désavoué à de nombreuses reprises par l’aile dure de son mouvement qui depuis plusieurs mois s’est escrimée à lui faire avaler toutes sortes de couleuvres. C’est ainsi qu’en mai dernier et alors qu’il avait pourtant obtenu le soutien inespéré de Washington pour son plan de séparation unilatérale d’avec les Palestiniens, les faucons du Likoud avaient réussi à convaincre une majorité des quelque 200 000 membres du parti de rejeter ce projet. Quelques mois plus tard, confronté à une grave crise politique du fait de l’opposition des mouvements religieux et d’extrême droite à son plan de retrait de Gaza, Ariel Sharon avait une nouvelle fois été sanctionné par son parti qui lui a interdit en août de négocier une quelconque alliance avec l’opposition travailliste. Le chef du Likoud a dû en outre affronter les manifestations des colons, les insultes de tous genres, ainsi que les menaces proférées contre sa vie par les ultra-orthodoxes.

Le vote de jeudi était donc crucial pour le Premier ministre qui depuis le limogeage la semaine dernière des ministres du parti laïc Shinouï –qui s’étaient opposés au vote du budget 2005– gouvernait sans majorité à la Knesset, s’appuyant uniquement sur les quarante députés de son mouvement (sur 120). Il faut dire qu’Ariel Sharon n’a pas ménagé sa peine ces derniers jours, intervenant sur tous les médias pour mettre en garde ses détracteurs contre les risques d’un nouveau camouflet. Il a notamment fait valoir aux membres du Likoud qu’en refusant la mise en place d’un gouvernement d’union nationale, ils parviendront certes à entraver son projet de retrait de la bande de Gaza mais ils provoqueront dans le même temps des élections législatives anticipées plus que périlleuses pour le parti. La majorité des Israéliens soutient en effet le plan de désengagement et ne manquera sans doute pas de sanctionner ceux qui s’y opposent. «Des élections maintenant seraient une très grave erreur car Israël lutte contre le terrorisme, relance l’économie et fait face à des défis historiques», a notamment plaidé Ariel Sharon sur les ondes de la radio israélienne. «Nous sommes engagés dans une initiative pour évacuer la bande de Gaza et cela mettrait un terme à ce projet», a-t-il également ajouté.

Les travaillistes d’accord pour entrer aux affaires

La victoire sans appel d’Ariel Sharon ouvre désormais la voie à la formation d’un cabinet d’union nationale en faveur duquel les travaillistes se sont d’ailleurs déjà prononcés. Selon un conseiller du Premier ministre, les négociations à ce sujet devraient commencer dès le début de la semaine prochaine, «lorsque la direction du parti travailliste aura donné son feu vert samedi soir». Le bureau politique de ce parti doit en effet encore décider la composition des équipes de négociateurs. Mais avant de rejoindre le gouvernement, l’opposition devrait sans doute négocier des modifications de budget dans un sens plus social même si l’application du plan de retrait de Gaza reste l’un de ses principaux objectifs. «Ma seule motivation est de faire en sorte que le processus de paix reste en vie», a récemment confié le chef du parti travailliste Shimon Peres. «Sans nous le gouvernement n’a pas de majorité. Il tombera et il y aura des élections anticipées. Or je pense que l’année 2005 devrait être consacrée à la paix et non à la politique intérieure», a-t-il également défendu.

Mais en bon stratège qui ne veut pas mettre tous ses œufs dans un même panier, Ariel Sharon cherche également à rallier le Shass et le Judaïsme unifié de la Torah, deux partis religieux ultra-orthodoxes qui disposent respectivement de onze et cinq députés et cela bien que ces formations s’opposent à son plan de désengagement de la bande de Gaza. En cas d’accord avec ces deux mouvements et avec le soutien des élus travaillistes, le Premier ministre disposerait enfin d’une assise parlementaire solide de 79 députés sur 120 après six mois de crise gouvernementale larvée.

La perspective d’un cabinet d’union nationale aux commandes en Israël a été favorablement accueillie par les Palestiniens. «Nous espérons que la formation d’un nouveau gouvernement conduira à la relance d’un processus de paix significatif qui mènera à la fin de l’occupation israélienne depuis 1967 et à une solution à deux Etats», a ainsi affirmé le ministre palestinien en charge des négociations, Saëb Erakat.



par Mounia  Daoudi

Article publié le 10/12/2004 Dernière mise à jour le 10/12/2004 à 16:06 TU