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Chronique Médias

Deux nouvelles chaînes internationales d’information continue : France 24, Al-Jazira English

Amaury de Rochegonde
Amaury de Rochegonde

C’est dans quinze jours, le 6 décembre, que sera lancée France 24, la fameuse CNN à la française qu’on attend depuis maintenant quatre ans. Ce sera la première chaîne qui sera créée d’abord sur Internet via le site france24.com puis, trente-six heures après, sur le câble et le satellite. Dès son lancement, la chaîne affirme pouvoir être reçue par 250 millions d’individus en Afrique, en Europe, y compris dans les anciennes républiques soviétiques, au Proche et au Moyen-Orient ainsi qu’à New York ou à Washington. A Paris, le jour du coup d’envoi, France 24 sera visible sur des écrans géants installés sur les Champs-Elysées pour donner encore plus d’ampleur à l’événement. Au siège de la chaîne, à Issy-les-Moulineaux (banlieue parisienne), où des plâtriers achèvent les derniers travaux, on peut lire ce slogan en anglais «Everything, you are not supposed to know». Traduction : «tout ce que vous n’êtes pas censé savoir».

Pour les 170 journalistes bilingues de la chaîne, qui ont commencé à s’entraîner en réalisant des journaux dans les conditions du direct, il y a en effet un vrai défi. Il va leur falloir nourrir simultanément deux chaînes, un canal en français et un canal en anglais, avec parfois des invités différents. Sans parler de la langue arabe qui sera présente sur le site et sera aussi une langue de l’antenne dès l’an prochain. Mais le principal défi qui attend France 24, c’est surtout de tenir sa promesse d’une information différente. Car ce que demandent les téléspectateurs potentiels dans le monde, c’est une information contradictoire par rapport à la vision anglo-saxonne de CNN, Fox News ou même BBC World. Sur des sujets comme la guerre en Irak, où les pays de ces trois chaînes sont des belligérants, il y a le sentiment d’une manipulation comme on a pu le voir à propos des introuvables armes de destruction massive de Saddam Hussein. Alain de Pouzilhac, le patron de la chaîne, estime que France 24 peut tirer son épingle du jeu de cette perception tant la France est, selon lui, le pays de la contestation permanente, associé au goût de la culture et de l’art de vivre. La chaîne va donc s’adresser à ce que l’ancien publicitaire appelle les nouveaux leaders d’opinion, c'est-à-dire en gros, ceux qui ont fait des études et qui représentent 25 à 30% de la population des pays concernés.

France 24 devra aussi affronter un nouveau concurrent, Al-Jazira English

Depuis le 16 novembre, Al-Jazira English a commencé à émettre auprès de 50 millions de foyers et le constat qui anime son directeur Nigel Parsons, un ancien de la BBC, n’est pas très éloigné de celui de France 24. Comme la future chaîne française, Al-Jazira English s’appuie sur la défiance existante à l’égard des médias internationaux et vise les jeunes leaders d’opinion. Elle permet aussi à de nombreux occidentaux de découvrir ce qu’est cette fameuse chaîne qatari qui a certes un point de vue particulier sur le monde arabe mais n’en reste pas moins professionnelle en sollicitant les avis des diverses forces en présence, notamment les autorités israéliennes. Finalement, cette Al-Jazira, que personne n’a jamais vraiment regardé mais que tout le monde associe à la diffusion des cassettes de Ben Laden, elle est donc respectable ! Tony Blair, en accordant à la chaîne sa première interview, a renforcé cette idée. On s’aperçoit aussi que le monopole anglo-saxon de l’image d’info internationale est en train de s’effondrer. Que les images de CNN ne sont plus un passage obligé auxquelles chaque journaliste est tenu de se situer. Peut-être que cela désacralisera l’image anglo-saxonne qui, la guerre du Golfe l’a montrée, est parfois très proche de la propagande.

En partenariat avec l’hebdomadaire Stratégies

par Amaury  de Rochegonde

[25/11/2006]