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FMI-Banque mondiale

Grandes manœuvres autour de la succession de Köhler

Un an avant la fin de son mandat de directeur général du FMI, Horst Köhler a démissionné pour briguer la présidence de la République fédérale d’Allemagne. Les grandes manœuvres pour sa succession commencent immédiatement.
Le directeur général du FMI depuis 2000, Horst Köhler, a créé la surprise en annonçant sa démission immédiate. Il a en effet été désigné comme candidat de l’opposition au poste de président fédéral allemand en remplacement du social-démocrate Johannes Rau. Son élection le 23 mai prochain, effective à compter du 1er juillet pour un mandat de cinq ans, ne fait pas de doute car un accord est intervenu entre les formations CDU-CSU et le FPD qui détiennent la majorité au niveau du Bundestag et du Bundesrat réunis.

Horst Köhler, dont le mandat à la tête du FMI courait jusqu’en 2005, ouvre donc avec un an d’avance la course à sa succession. Les 24 administrateurs du FMI qui représentent les 184 Etats membres de l’institution devront lui choisir un remplaçant au pied levé, si possible avant l’assemblée de printemps qui doit se tenir, avec celle de la Banque mondiale, les 24 et 25 avril. Jusque là c’est l’américaine Anne Krueger, numéro 2 du FMI, qui assure l’intérim.

Il est de tradition depuis la création du FMI et de la Banque mondiale en 1944 que le premier soit dirigé par un européen et la seconde par un représentant des Etats-Unis. De fait, parmi les huit directeurs généraux du FMI qui se sont succédés: trois Français, deux Suédois, un Hollandais, un Belge et, dernièrement un Allemand. Ce «consensus de Washington» à propos de la répartition des rôles au sein des institutions de Bretton Woods donne lieu à une vaste lutte d’influence. En 2000, lors du départ du français Michel Camdessus, le nom du secrétaire allemand aux Finances de l’époque Caio Koch-Weser avait fait l’objet d’un veto de la part des Américains et les Européens s’étaient mis d’accord sur la candidature de Horst Köhler, alors président de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD).

Mano a mano entre l’Europe et les Etats-Unis

Moins de 24 heures après la démission du directeur général du FMI plusieurs candidatures possibles sont déjà évoquées. La plus «logique» serait celle de Jean Lemierre, le Français qui dirige actuellement la BERD. Mais la France a obtenu la direction générale du FMI plus souvent que n’importe quel autre pays européen et c’est déjà un français Jean-Claude Trichet qui dirige la Banque centrale européenne. Le même argument pourrait être opposé à Pascal Lamy dont le mandat de commissaire européen vient expiration en 2004.

Le Britannique Andrew Crockett qui a déjà occupé plusieurs postes au FMI entre 1979 et 1989 n’est pas mal placé, mais on parle aussi du ministre britannique de l’Economie et des finances Gordon Brown qui pourrait poser sa candidature en mettant ainsi fin ouvertement à ses ambitions de succéder à Tony Blair comme Premier ministre.

D’autres hypothèses circulent néanmoins dont un Polonais, un Italien, mais aussi l’Américain Stanley Fischer, ancien directeur général adjoint du FMI. On prête même aux Etats-Unis l’intention de troquer la direction de la Banque mondiale contre celle du FMI.

Mais d’autres candidats pourraient venir perturber ce mano a mano entre l’Europe et les Etats-Unis. Le Japon avait fait campagne en 2000 pour la nomination d’un Asiatique à la tête du FMI et on parle cette fois de Haruhiko Kuroda, conseiller spécial du Premier ministre Koizumi. Avec l’émergence de la Chine et de l’Inde sur la scène internationale un rééquilibrage des pouvoirs entre l’Occident et l’Orient devient un argument de poids.

L’idée pourrait aussi venir à d’autres pays émergents dont l’influence ne cesse de grandir dans les organisations multilatérales, dont l’OMC qui sait qu’elle doit désormais compter avec des géants comme, par exemple, le Brésil. Ainsi le président Lula da Silva vient de faire appel au soutien du président français Jacques Chirac et du chancelier allemand Gerhard Schröder pour assouplir les règles du FMI afin de ne pas compromettre la croissance et la stabilité en Amérique latine. La désignation d’un nouveau directeur général du FMI pourrait être l'occasion pour ces pays de poser leurs conditions.

Ecouter également:

Marc Lebeaupin, journaliste à RFI, spécialiste de l’économie est l'Invité de la rédaction du 5 mars 2004. Il répond aux questions de Frédérique Genot sur la succession de Horst Köhler (4’22’’).



par Francine  Quentin

Article publié le 05/03/2004