par Solenn Honorine
Article publié le 11/05/2009 Dernière mise à jour le 13/05/2009 à 14:24 TU
Le dinosaure est parvenu à se hisser jusqu’en haut de la plage, énorme. Il bat de grands coups d’ailes, faisant gicler le sable autour de lui. C’est une nuit sans lune, et seules les myriades d’étoiles éclairent faiblement sa cuirasse noire striée de piques parallèles, en forme de larme et à la consistance d’un cuir tanné par des années sous la mer. Cette tortue est l’animal le plus étrange que je n’ai jamais vu. Il peut atteindre 2,5 mètres de long, et peser autant qu’une petite voiture, parcourir quelque 20 000 kilomètres à la nage pour s’offrir un bon dîner, et garder un attachement indélébile à la maison de son enfance :quoi qu’il arrive, l'animal reviendra à l’endroit même où il est né pour donner naissance à ses petits.
Des plages cruciales pour la conservation des tortues
Pendant des générations, les habitants de Wau ont mangé viande et œufs de tortues, « même Mama ! ». Cela ne posait pas de problème jusqu’aux années 1980, lorsque un nouveau ferry reliant les deux principales villes de Sorong et Manokwari, a commencé à passer régulièrement au large du village, brisant ainsi son isolement. Les villageois ont pu vendre œufs et viande de tortue aux étrangers, en échange d’argent –une commodité alors nouvelle. Pour la première fois, ils ont pu acheter sucre, cigarettes, riz, vêtements ; mais cela était au détriment des tortues, dont les populations ont souffert.
Compétition pour des ressources limitées
L'Organisation non gouvernementale WWF a donc eu l’initiative de payer les villageois pour protéger les tortues au lieu de les détruire. Aujourd’hui il emploie une vingtaine de personnes pour patrouiller les plages et, en échange, personne ne ramasse les œufs des tortues. « Ah ben non, on a trop peur de Mama Tabita », grommelle Martina Yom, une villageoise de Wau.
Lindernd Rouw, un représentant du gouvernement local, sert de médiateur entre les villageois. Il use de son charisme de prêtre pour apaiser les esprits. « C’est un tout petit conflit », modère-t-il. « Vous savez, c’est la culture en Papouasie. Ici nous possédons la terre en commun, et toutes les décisions doivent être prises ensemble ce qui cause des problèmes ».
En effet les conflits liés au contrôle de la terre –ici, des ressources liées à la plage où les tortues nidifient– sont très courants en Papouasie. Le conflit se résume vite : l’argent. Qui bénéficie des emplois créés par l’ONG étrangère ? Comment diviser les revenus ? Les responsables du WWF, eux, se retrouvent dans une situation délicate. « Protéger la nature, c’est d’abord s’occuper des hommes », insiste Creusa Hitipeuw, responsable du projet tortues. « Et avec l’aide du gouvernement local, il faut trouver un moyen de faire profiter tout le monde ».
La plage de Batu Rumah est l’une des quatres plages de Papouasie indonésienne qui réunissent plus de 70% des tortues luths qui viennent se reproduire.
(Photo : Solenn Honorine/ RFI)
Pour en savoir plus :
- Consulter le site de Actu-environnement : Mobilisation pour la défense de la tortue luth
- Lire Pour une planète verte et des habitants responsables, éditions Nathan
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