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Chronique armée-défense

«Le commandement impossible»

Philippe Leymarie 

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Philippe Leymarie
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La tournée du président américain George W. Bush sur le continent africain : Washington espérait mettre en place un « commandement militaire américain » pour l'Afrique, mais a dû réviser ses ambitions à la baisse. Le projet paraissait limpide. L'Afrique, d'est en ouest, notamment au niveau sahélien, peut être vue comme un « arc de crise », donc un enjeu de sécurité, à l'aune de la « guerre contre le terrorisme » qui aura été la ligne directrice de l'administration Bush durant ces huit années.

De la Mauritanie à la Somalie, on a des pays islamisés, en contact avec le monde arabe, et aux prises avec des espaces de « non droit », des « zones grises » dans les confins frontaliers, que les armées locales peinent à contrôler, en tout cas sans l'aide étrangère. A quoi s'ajoute un regain d'intérêt pour les matières premières dont regorge le continent : les métaux rares, et maintenant le pétrole, les Etats-Unis projetant de tirer du Golfe de Guinée jusqu'à un quart de leurs besoin d'ici une dizaine d'années.

Pour « monitorer » ces grands espaces, faire du renseignement et appuyer les pays amis, coordonner les exercices, suivre les programmes d'entraînement, fournir des équipements, etc., il était logique de créer un commandement africain « dédié » comme on dit et non plus de continuer à faire dépendre le continent, selon les pays, des commandements américains, de l'Europe, du Pacifique, ou du Moyen-Orient, comme c'était le cas jusqu'ici, avec un efficacité bien sûr très relative.

L'annonce de la création de « l'Africom », l'an dernier, par le président Bush, se voulait un geste « politique » : la reconnaissance de l'importance et de la vitalité d'un continent africain avec lequel la première puissance du monde, elle-même, doit désormais compter. Petite attention : c'est l'officier général issu de la communauté noire le plus gradé qui a été placé à la tête du nouveau commandement.

Mais, est-ce parce que cette puissance, qui peine à triompher sur les grands terrains extérieurs qu'elle s'est choisis, comme l'Irak et l'Afghanistan, a paru trop écrasante, et susceptible d'amener la foudre avec elle : toujours est-il que l'opération élémentaire, pour la création de cet « Africom », qui consistait à lui trouver un siège, a piteusement échoué, peu ou pas de candidats, ou pas ceux qu'il fallait. Exemple, Djibouti, trop à l'est, et qui héberge déjà l'unique base américaine sur le continent africain. Sao Tomé ou le Cap Vert, mieux situés pour ce qui est des gisements pétroliers, mais trop insulaires. Le Maroc, dont il est question régulièrement : trop voyant, trop « Afrique du Nord ». Ou encore le Liberia, unique candidat vraiment « officiel », avec un beau nom, c'est vrai ; mais un choix qui serait un peu caricatural : c'est le pays fondé par les Noirs américains !

Mais, refus de tous les autres Maghrébins, prudence des Ouest-Africains, défiance des pays de La Corne et de l'Afrique Australe et surtout des poids lourds du continent : l'Afrique du Sud, le Nigeria. Faute de mieux, l'exécutif américain a donc jugé qu'il était urgent d'attendre : dans l'immédiat, « Africom » continue d'exercer son commandement depuis Stuttgart, en Allemagne, où est stationnée une des principales garnisons américaines d'Europe.

Et le Pentagone a changé son fusil d'épaule en ce qui concerne la nature même de cet outil : « Africom » sera à moitié civil ; l'adjoint du commandant étant une spécialiste du développement. « Africom » ne donnera lieu à la création d'aucune nouvelle base militaire. « Africom » sera « éclaté » en des représentations ou agences spécialisées sur tout le continent. Un concept tout à fait nouveau !


par Philippe  Leymarie

[17/02/2008]

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