Thaïlande: Thaksin face à l’islam
Any Bourrier
(Photo: RFI)
Le Premier ministre Thaksin Shinawatra a promis de promouvoir le développement du sud de la Thaïlande, région à majorité musulmane, frappée par une vague d’attentats contre l’armée et contre une vingtaine d’écoles. Il a compris que sa politique musclée, insensible aux valeurs de l’islam, n’est pas adaptée pour résoudre les problèmes de cette communauté.
La flambée de violence dans les provinces de Narathiwat et de Pattani, jouxtant la Malaisie, pose un double défi au pouvoir thaïlandais: elle met en cause la stabilité de la Thaïlande à un an des élections générales. Et elle sonne l’heure de la vérité pour la politique du gouvernement à l’égard de l’islam. Jusqu’à présent, aux yeux de George Bush, Thaksin était le meilleur élève asiatique dans la lutte anti-terroriste, depuis qu’en juin 2003 il était parvenu à arrêter Himbali, l’organisateur présumé de l’attentat d’octobre 2002 à Bali.
Le gouvernement thaïlandais avait pourtant tardé à reconnaître la présence de groupes terroristes islamistes sur son territoire, ce qui avait d’ailleurs agacé les Américains. Reste que la présence avérée de la Jeemah Islamiyah semble pour le moment parcellaire et ne présente pas de risque majeur pour le pays qui compte quatre millions de musulmans sur une population totale de 62 millions.
Pour récompenser le meilleur élève asiatique dans la lutte contre les terroristes, les américains lui ont proposé un accord de libre-échange. Une proposition faite lors du sommet de l’Apec qui s’est tenu à Bangkok en octobre. La signature de cet accord, après ceux déjà signés par la Thaïlande avec la Chine, l’Inde, l’Australie, le Japon et la Corée du Sud, renforcerait davantage le Premier ministre lors des élections générales de 2005.
Mais Thaksin est déjà en position de force. Il est soutenu par une majorité parlementaire écrasante et bénéficie de bons résultats économiques, largement dus à une conjoncture internationale moins défavorable que prévu. En politique étrangère, la Thaïlande tente d’imposer un leadership régional qui ne va pas sans susciter parfois des réactions de rejet des pays voisins.
Les violences séparatistes qui agitent aujourd’hui le sud du pays risquent toutefois d’ébranler l’excès de confiance en soi du Premier ministre, dont le corollaire est une nette propension à l’exercice solitaire du pouvoir. Mais elles ne semblent pas de nature à menacer sérieusement sa réélection. En revanche, un éventuel ralentissement de l’économie internationale pourrait avoir de lourdes conséquences sur la pérennité de la coalition au pouvoir.
par Any
Bourrier
[12/01/2004]