Chine-Afrique, des intérêts bien compris

Depuis une dizaine d’années, l’Afrique est traditionnellement le continent choisi par la diplomatie chinoise pour la première visite à l’étranger d’un ministre des Affaires étrangères. Li Zhaoxing ne pouvait pas échapper à la règle. Mais la tradition n’explique pas à elle seule ce regain d’intérêt chinois pour le continent africain. L’Afrique est aujourd’hui l’une des principales sources de matières premières indispensables au développement soutenu de la Chine. Elle est également un excellent marché pour sa production industrielle. Pékin exporte vers le continent noir des biens à haute valeur ajoutée, comme des machines ou des équipements électroniques.

L’offensive commerciale chinoise frappe de plein fouet les marchés africains envahis de produits « made in China » à bas prix. La Chine exporte aussi de la main-d’œuvre. Mais contrairement aux années 70, lorsque des équipes médicales ou des ingénieurs agricoles étaient dépêchés par Mao en Afrique, ce sont aujourd’hui les ouvriers chinois qui s’installent dans des pays comme l’Algérie ou l’Egypte pour y construire des logements.

Depuis quelques années, Pékin est la destination de prédilection des présidents et des diplomates africains. A l’Institut des Affaires étrangères de Pékin, une vingtaine de haut fonctionnaires du Soudan, du Nigeria ou du Mali sont reçus tous les ans pour des cours de formation. « Nous voulons faire connaître aux Africains les grandes lignes de la diplomatie chinoise », assure le directeur de l’Institut Yuan Shibin.

Pendant leurs stages, les jeunes diplomates africains apprennent que « la montée en puissance de la  Chine est avant tout pacifique » ou que « la Chine défendra toujours les intérêts des pays en développement dans les instances internationales ». Les points les plus importants de l’enseignement de cet institut sont « la non-ingérence dans les affaires intérieures de chacun », « l’aide économique  sans conditions » et le « refus de l’universalité des valeurs occidentales ». Pour certains dirigeants africains, qui n’aiment pas recevoir des leçons de démocratie, c’est du pain béni.

Reste que la Chine ne perd pas de vue ses propres intérêts notamment dans le domaine de l’énergie. L’Afrique est aujourd’hui l’une de ses trois sources prioritaires d’approvisionnement énergétique avec l’Asie centrale et la Sibérie russe. La tournée du ministre des Affaires étrangères Li Zhaoxing ne fait que confirmer cette volonté de renforcer les liens avec un continent qui est en passe de devenir le deuxième partenaire commercial et diplomatique de l’Empire du Milieu.

par Any  Bourrier

[12/01/2006]