Que la CAN commence
18 janvier
2002
Il
sera seize heures, en heure locale, lorsque le Chef de
l'Etat malien, Alpha Oumar Konaré donnera le coup
d'envoi de la 23 ème Coupe d'Afrique des Nations,
la première du XXIème siècle. Des
moments solennels qui marqueront, de manière indélébile,
l'histoire du football et de tout un continent.
|
Le
Mali accueille la 23ème Coupe d'Afrique des
Nations. Match d'ouverture à 16h00 à
Bamako. ® DR
|
Quarante-cinq
ans après la création de la CAN, c'est un
des pays parmi les plus pauvres -et ce n'est pas faire
du misérabilisme que de le dire - qui aura le privilège
de faire entrer la compétition dans une ère
nouvelle. Le manque de ressources financières n'a
jamais signifié manque de ressources humaines,
manque d'imagination, de créativité ou de
capacité d'adaptation.
Bien
peu, en janvier 98, croyaient ce Mali capable d'aller
au bout de son audacieux pari. Aujourd'hui chacun s'interroge:
mais comment a-t-il bien pu faire pour offrir plus que
ce qu'on lui demandait, cinq villes et non quatre, six
stades et non quatre ? Sans doute parce qu'ici, on a choisi
de mettre à profit le rendez-vous biennal du football
africain pour accélérer le processus de
développement , pour doter les plus grandes villes
d'infrastructures modernes et de ne laisser personne sur
le bord de la route. Le reste appartient désormais
aux seize équipes en lice pour la succession des
Lions Indomptables du Cameroun.
On
l'a dit et répété. A un peu plus
de quatre mois du coup d'envoi de la Coupe du Monde, les
cinq représentants de l'Afrique sont présents
au Mali, ce qui éclaire d'un éclat exceptionnel
l'épreuve. Pour autant le Cameroun, l'Afrique du
Sud, le Nigeria, le Sénégal et la Tunisie
ne sont pas garantis de figurer sur le podium au soir
du 10 février. Parce que le football africain s'est
offert ces dernières années une remise à
niveau accélérée. Toutes les équipes
alignées au départ présentent des
qualités évidentes; le fossé s'est
rétréci depuis le début des années
quatre-vingt dix.
Les
surprises ne sont pas à écarter. Il faut
se souvenir, à titre d'exemple, que le Liberia
a longtemps damé le pion au Nigeria lors des éliminatoires
de la Coupe du Monde; le Sénégal s'est,
lui, brusquement imposé sur le devant de la scène,
sans avoir jamais fait partie du peloton de tête;
un voisin du Mali, le Burkina Faso, à la situation
économique comparable, revient pour la quatrième
fois consécutivement en phase finale.
Dans
ces conditions, on comprend aisément que la CAN
est plus indéchiffrable qu'elle ne l'a jamais été.
Les prétendants au titre sont multiples. Les seigneurs
d'hier, Indomptables, Super Eagles, Bafana Bafana et autres
ne le seront peut-être plus demain. Mystère
de Dame Coupe, dont personne ne peut dire qu'elle lui
réservera ses faveurs.
Un
trophée qui rappelle celui de la Coupe du monde
L'entrée
en matière promet d'être somptueuse devant
cinquante mille privilégiés qui seront dans
le stade et des millions et des millions de téléspectateurs
qui vibreront aux exploits attendus des artistes maliens
et libériens. Le Mali, comme tout organisateur,
rêve de garder une paire d'années le nouveau
trophée mis en jeu, un trophée qui n'est
pas sans rappeler celui de la Coupe du monde, et qui comme
on le dit familièrement, a de la "gueule".
Le
Liberia, son adversaire, a acquis toute sa notoriété
lors de la dernière décennie, grâce
au merveilleux talent de George Weah, alias Mister George.
A trente-cinq ans passés, il s'apprête à
quitter la scène continentale après avoir
fait flamboyer les couleurs de son pays et de l'Afrique
sur la planète football. Ce match d'ouverture est
une forme d'apothéose, car, à moins d'un
miracle, on le voit mal jouer également celui qui
clôturera la compétition. Pouvait-on rêver
meilleur hommage à un homme qui a tant contribué
à affirmer la permanence du talent des footballeurs
africains? Le Mali, en ce jour de forte émotion,
sera à travers cette rencontre le lien entre le
dernier et le premier "Ballon d'Or" africain,
entre Salif Keita et George Weah. Un match unique entre
deux symboles. Un match qui sera aussi le passage de témoin
entre ancienne et nouvelle génération.
Notre
seul regret c'est d'avoir appris, il y a quelques heures,
qu'une autre figure de légende de l'Afrique, Hossam
Hassan ne serait pas de la partie, pour cause de blessure
à la jambe. Avec dix buts à son actif jusqu'à
présent, il aurait pu approcher voire dépasser
le vieux record d'un autre attaquant de grande classe,
l'Ivoirien Laurent Pokou, qui, en deux éditions,
a placé la barre à quatorze buts. Mais c'est
une certitude, leurs héritiers sont là.
Certains vont profiter de cette Can pour emboîter
les crampons de leurs illustres aînés.
Que
la fête commence. Qu'elle anticipe, dans la magnificence,
le rendez-vous asiatique du mois de juin !
Gérard
Dreyfus