Il
fallait un vainqueur
10 février
2002
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Le capitaine camerounais
Rigobert Song brandit la Coupe d'Afrique des nations
© DR
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De l'un de nos envoyés
spéciaux à Bamako
Il fallait un vainqueur. Et ce
fut l'équipe la plus expérimentée qui
l'emporta dans l'épreuve coup de dés, les tirs
au but. Mais quelle finale ! Passionnante de bout au bout,
en dépit du mutisme des attaquants solidement muselés
par des défenseurs omniprésents et intraitables.
Incertaine et indécise jusqu'au dernier des tirs au
but. Les supporteurs des deux camps ont passé trois
heures d'anxiété permanente, ne sachant jamais
à qui Dame Coupe offrirait ses faveurs.
On était parti très
vite côté sénégalais. Dès
la sixième minute, une talonnade d'El Hadji Diouf pour
Henri Camara mettait en état d'alerte Alioum Boukar
tout heureux de voir le tir du dernier nommé passer
de peu au-dessus de sa barre. Et les protégés
de Bruno Metsu continuaient leur ronde dans les entrailles
des Indomptables. On se disait alors que le Gaïndé
allait peut-être mettre à la raison le Lion camerounais,
superbe en demi-finale, mais peut-être parce l'Aigle
malien, ce jour-là, n'avait rien de royal. A la onzième
minute, Samuel Eto'o, excentré sur la droite de la
surface sénégalaise, adressait un bon tir, mais
dans les bras de Sylva. L'opposition de styles se précisait:
le Sénégal avait choisi d'opérer en passes
courtes, comptant sur le relayeur Fadiga pour alimenter en
bons ballons Diouf et Henri Camara; le Cameroun jouait plus
large, passes de trente mètres, jeu en profondeur.
Le rythme était là, la vivacité aussi,
les occasions de but également.
Mais il était écrit
que, dans un stade du 26 mars bondé comme il ne l'avait
jamais été, dégoulinant de spectateurs,
assis dans les marches, cela ne passerait pas. Ndiefi titularisé
d'entrée, Mboma ne figurant même pas sur la feuille
de match en raison de sa blessure à la cuisse droite,
frappait à droite du but sénégalais.
Aussitôt Henri Camara obligeait Alioum Boukar à
détourner son tir en corner. Puis Ndiefi à nouveau
expédiait un ballon sur le petit filet. Dans la foulée
El Hadji Diouf reprenait de volée, sur la droite du
but camerounais. Le ballon allait d'une défense à
l'autre. Et encore Ndiefi à la 30ème minute,
mais Sylva venait cueillir le ballon dans ses pieds. A peine
dix minutes plus tard, Samuel Eto'o se distinguait en tentant
sa chance du pied droit; Aliou Cisse après avoir stoppé
ce premier essai lui rendait le ballon et, cette fois, Eto'o
changeait de pied, contraignant Sylva à une belle détente
horizontale.
Rendez-vous au mois de juin
Et nous voilà reparti
dans la défense camerounaise, avec un Diouf très
percutant qui donnait des sueurs froides à Boukar et
ses cerbères. Puis dans la défense sénégalaise
avec un très bon centre de Wome pour Eto'o. Encore
raté. Ndiefi marquait bien de la tête, mais l'excellent
arbitre Al Ghandour refusait de valider le but pour une faute
sur un défenseur sénégalais. On n'avait
pas eu le temps de s'ennuyer, mais on se demandait si le Sénégal
qui avait dû jouer les prolongations en demi-finale,
pourrait résister à la pression du champion
sortant.
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Le Cameroun remporte sa
quatrième victoire en Coupe d'Afrique des nations.
Il égale ainsi l'Egypte et le Ghana ©
DR
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La deuxième période
allait être de la même facture, mais sur un rythme
moins soutenu. L'épreuve de force entre les deux prétendants
à la couronne petit à petit laminait les deux
camps, même si les Camerounais paraissaient posséder
plus de répondant. Expérience et prolongations
du tour précédent en moins. Et Ndiefi sonnait
la première alerte. Résistant au retour un peu
désespéré d'Aliou Cisse, il expédiait
son tir sur l'intraitable Sylva. Kalla se mêlait à
ses attaquants sur un corner, mais Sylva était partout,
dans les airs, au sol. Absolument infranchissable.
A la soixante-dixième
minute, débordant sur le côté droit à
l'intérieur de la surface, Ndiefi, virevoltant comme
à son habitude, voyait son tir renvoyé par la
base du montant gauche des buts de Sylva. Une occasion gâchée
parmi tant d'autres. Olembe très en jambes comme lors
du match contre le Mali plaçait quelques démarrages
explosifs, mais sur le plus dangereux, Foe voyait son tir
détourné en corner. Le destin jouait avec les
nerfs des acteurs. Les fauves sortaient leurs griffes, mais
personne ne voulait céder. Alors vinrent les prolongations.
Stériles. Même si tout à fait à
la fin, Souleymane Camara arrivait un peu en retard après
une passe pourtant bien ajustée par Diouf. La dernière
action était camerounaise. Eto'o, d'une manière
incompréhensible tirait sur un Sylva dont il était
écrit qu'il ne pouvait pas être battu. Ainsi
donc comme en 2000, il fallait avoir recours à l'épreuve
des tirs au but.
Wome, le premier en selle, voyait
sa tentative stoppée par Sylva; Coly transformait son
essai; puis Suffo entré au cours des prolongations
égalisait. Le Sénégal reprenait l'avantage,
2-1, grâce à Fadiga. Lauren remettait les deux
équipes à égalité. Au tour d'Amdy
Faye. Stoppé par Boukar. Njitap marquait. Diouf tirait
à côté. 3-2 pour le Cameroun. Song, qui
en cas de succès donnait le titre à son équipe,
échouait à son tour; enfin arriva le tour de
Cisse. Moment d'émotion. Le Sénégal pouvait
égaliser à trois partout. Cinq pas d'élan.
La balle part au centre. Alioum Boukar, admirablement placé,
repousse. Le Cameroun est champion.
Il fallait obligatoirement un
vainqueur. Il aurait tout autant mérité d'être
sénégalais. En fait le seul vainqueur de cette
finale restera le football africain, pour l'extraordinaire
duel de ses deux fauves. Lions Indomptables et Lions de la
Teranga ont décidé de croquer maintenant à
belles dents le repas mondial. Rendez-vous au mois de juin.
GD
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