21 - 5
(22 janvier 2002)
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Ce sont les artistes
qui décident sur le terrain. Ici, le sénégalais
El Hadi Diouf (de face) à la lutte avec un joueur
égyptien.
©AFP |
De l’un de nos envoyés
spéciaux à Bamako
21-5 : ce n'est pas le score
d'un match de handball ou d'une partie de rugby. Ce sont deux
chiffres dont le rapport suscite une certaine inquiétude.
21-5 : ce n'est pas le score
d'un match de handball ou d'une partie de rugby. Ce sont deux
chiffres dont le rapport suscite une certaine inquiétude.
Vingt et un, c'est le nombre de buts inscrits lors de la première
journée de la CAN 2000 ; cinq, celui du nombre de buts
marqués à la même étape de la CAN
2002. C'est le plus faible total enregistré depuis
que la Coupe d'Afrique réunit seize équipes
en phase finale, c'est à dire depuis 1996. On avait
commencé par seize buts (avec un match en moins, puis
on était passé à dix-huit et vingt-un
avant de chuter cette année à cinq. A cela on
peut avancer plusieurs raisons.
D'abord, le nivellement des valeurs
enregistré ces dernières années en Afrique.
Nul, y compris parmi les ténors, ne se trouve à
l'abri d'un adversaire réputé plus faible. Dans
le contexte africain, les rencontres sont souvent très
serrées et les scores étriqués, sans
que les attaquants parviennent à se mettre en évidence.
De véritables opérations
de commando
Ensuite, il y a un temps d'adaptation
nécessaire à la compétition. De plus
en plus d'équipes puisent largement dans leur réservoir
de joueurs expatriés, ce qui ne leur permet pas de
bénéficier de leur apport pendant la période
de préparation. Autrefois, avec les joueurs locaux,
on pouvait monter de véritables opérations de
commando pendant les trois à quatre mois qui précédaient
la CAN. Ce n'est plus le cas aujourd'hui. Certaines formations
se sont présentées au Mali avec seulement une
ou deux rencontres de mise en jambes, n'ayant plus disputé
de rencontres depuis le mois de juillet. Il leur faut donc
au moins un match avant de retrouver les automatismes. Taribo
West, par exemple, disait qu'il lui était nécessaire
de s'adapter à ses partenaires de la défense
alors qu'il n'avait jamais joué avec eux auparavant.
Autre raison, les professionnels
sortent, pour la plupart d'entre eux, de l'hiver européen
où la température avoisine les zéro degrés.
Au Mali, même si la chaleur à cette période
de l'année n'est pas accablante, elle monte, en plein
soleil, à environ 35 degrés. On mesure la différence.
De plus, les terrains sont très secs, bosselés,
pleins de faux rebonds et la maîtrise de la balle est
rendue plus difficile.
Il faut dire, enfin, que les
défenses se sont renforcées, mieux organisées
dans le même temps où les grands attaquants disparaissaient,
comme partout dans le monde. S'il reste encore quelques buteurs
d'exception (en petit nombre) ils sont davantage épiés,
surveillés. Leur déplacement est analysé
par les entraîneurs qui peuvent ainsi passer des consignes
pour les museler. Par ailleurs, nombre de joueurs répugnent
à la prise de risque de peur d'être accablés
par un public intransigeant dans l'attente d'un but à
chaque tentative. Alors sur le terrain, les attaquants hésitent
et préfèrent se défausser sur un de leurs
partenaires. Les tentatives lointaines ne sont pas suffisamment
nombreuses. On attend d'être dans la zone de vérité
pour tenter sa chance. Quant aux coups de pied arrêtés,
d'évidence, ils n'ont pas été assez répétés
aux entraînements.
Ce sont là quelques explications
aux carences offensives constatées lors de la première
journée de la CAN 2002. Reste à savoir si certaines
équipes n'ont pas été en sur-régime,
auquel cas elles pourraient éprouver quelques problèmes
physiques par la suite, et d'autres en sous-régime.
Qui veut aller loin ménage sa monture, nous enseigne
le dicton. N'est-ce pas le buteur camerounais, Patrick Mboma
qui confiait après la victoire face à la République
Démocratique du Congo : «Pour nous, l'important
était de marquer trois points». Cinq matches
nuls dont quatre 0-0 et trois victoires par 1-0 en huit rencontres.
On espérait mieux. Ce sont les artistes qui décident
sur le terrain. Pourvu cependant que cela ne dure pas.
Gérard
Dreyfus
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