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Gérard Dreyfus répond à vos questions
30 janvier 2002


Photo : Philippe Couve / RFI

Devant le nombre sans cesse croissant de vos questions, Gérard Dreyfus a préféré les regrouper et y répondre.


De très nombreuses questions nous sont parvenues sur le comportement de telle ou telle équipe.

Il est difficile,alors que le premier tour n'est pas terminé de porter encore une appréciation sur chacune des équipes en présence.De plus comme nous l'avons déjà souligné, les journalistes ne pouvant assister à toutes les rencontres,ils doivent limiter leur jugement à ce qu'il voit à la télévision.Or la caméra suit le ballon,le porteur du ballon et son environnement immédiat.Il est plus difficile d'apprécier le comportement de l'ensemble du terrain, le positionnement et le changement de positionnement en fonction de situations précises.

Je remarque que les joueurs ont des coiffures pas du tout respectueuses. La FIFA ne peut-elle pas intervenir pour interdire ces fantaisies ?

Libre à chacun d'apparaître comme bon lui semble,à partir du moment où sa tenue est conforme aux règlements. Ici, le Congolais Muamba, par exemple a toujours les mains enveloppées dans des gants blancs. S'il pense que ça améliore sa performance, rien ne l'interdit. C'est son choix.
Le maillot des Camerounais, sans manches, a fait beaucoup jaser, a choqué parce qu'il s'agissait d'une tenue totalement inédite. Bien sûr, les autorités du football ont plongé dans leurs règlements. Rien ne stipulait que les maillots des joueurs devaient avoir des manches longues ou courtes. Ceux qui ont décidé de frapper les imaginations, c'est-à-dire les responsables de la société Puma, ont réussi un joli coup de pub. La tenue a choqué parce qu'elle était totalement inédite. C'était une première. On aime ou on n'aime pas. Personnellement, j'ai été un peu surpris.

Bravo pour votre longévité !

J'ai consacré trente ans de ma vie au sport africain et plus particulièrement à son football. Radio, presse écrite (j'ai été à l'origine de la création d' Afrique Football), télévision (responsable à l'origine de " Sport Africa " sur TV5). Sans passion, sans plaisir quotidiennement renouvelé, sans amour de l'Afrique, peut-être les choses eussent-elles été différentes. Je suis indéfectiblement attaché à ce continent et à ses hommes.

L'état des terrains ?

Ceux qui ont pu suivre les images à la télévision ont remarqué que le ballon ne restait jamais au sol, qu'il rebondissait trois, quatre fois et parfois davantage avant d'arriver à son destinataire. Dans ces conditions, la maîtrise technique relève parfois de l'exploit. Les Maliens ont fait le maximum, mais d'une manière générale, les conditions climatiques, la nature du sol rendent l'entretien des pelouses difficile. Il est rare de trouver de très bons terrains en Afrique. Soit le climat est trop sec, soit il est trop humide. C'est un constat, pas une critique. Tout le monde le sait et les remèdes ne sont pas faciles à trouver. Ici quand les pelouses ont été bien arrosées les choses se sont bien améliorées.

La CAN, éliminatoire de la Coupe du Monde ?

La décision était dans l'air depuis 98-99.La CAF l'avait proposée, la Fifa dans un premier temps avait dit non. Puis la Fifa s'était ravisée avant la dernière édition. Trop tard, avait répliqué la CAF.
Que se passe-t-il ? Les années de Coupe du monde, les éliminatoires de la CAN et du Mondial se chevauchent. Les joueurs en une année sont sollicités entre quatorze et dix-huit fois par leur équipe nationale. Leurs clubs, en Europe, ne veulent pas les libérer. Pendant leur absence, ce sont eux qui payent les joueurs. Comme les pays africains ne jurent que par leurs expatriés, la situation est devenue intenable. Il fallait prendre une décision. Les fédérations nationales auraient dû faire davantage confiance aux joueurs locaux, et ne faire appel, en tout cas pour les éliminatoires de la CAN qu'à un nombre limité de pros. Ils ne l'ont pas fait, aujourd'hui leur attitude a débouché sur cette nouvelle formule qui est très loin de faire l'unanimité, même si elle a été adoptée par l'assemblée générale de la CAF.En tout cas, les années de Coupe du monde, la CAN suscitera un énorme intérêt dans le monde entier et sera largement valorisée. La CAF engrangera des recettes très importantes. Les autres éditions risquent d'être moins populaires, moins médiatisées.

Les arbitres

Contrairement aux idées avancées, les arbitres africains ne sont pas mauvais. Ceux qui doivent progresser ce sont les arbitres assistants dont on a, hélas, parfois le sentiment qu'ils ne connaissent pas les règles du hors-jeu (on est hors-jeu au départ du ballon et pas quand on le reçoit). J'affirme que les arbitres sur le continent ont beaucoup progressé même s'il leur arrive de commettre des erreurs (facile de les critiquer quand on revoit trois, quatre fois et davantage une action litigieuse, sous des angles différents à la télévision).
J'ajoute que si vous faites un test auprès du public de chacun des 52 pays d'Afrique, vous entendrez la même accusation, nos arbitres sont mauvais. Je leur pose la question, comment dès lors pourraient-ils être bons au niveau africain ? Non, je crois que beaucoup, emportés par leur passion, oublient la raison et la mesure. Et puis, je leur rappelle qu'un arbitre marocain a dirigé la finale de la dernière Coupe du Monde. De grâce, un peu de mesure.


Des nouvelles de Théophile Abega

Le capitaine de l'équipe du Cameroun 82 en Espagne et de la formation championne d'Afrique en 84 est aujourd'hui le président du Canon de Yaoundé. Il a évolué quelques mois en France, au FC .Toulouse, à la fin de sa carrière, trop tard pour envisager un nouvel avenir de joueur. Et pourtant, quel talent ! Un des meilleurs n°10 jamais vus en Afrique.

Pourquoi les dirigeants ne font-ils pas confiance aux entraîneurs locaux ?

Je suis un chaud partisan des entraîneurs nationaux. Car ils sont loin d'être de mauvais entraîneurs. Mais les dirigeants ne leur font pas confiance. Déjà en leur allouant des salaires sans commune mesure avec ceux des étrangers auxquels ils sont prêts à faire appel. Lorsqu'un national demande des moyens, on lui répond qu'il n'y a pas d'argent et qu'il doit se débrouiller avec les moyens du bord. Un étranger, en tout cas au début, a tout ce qu'il demande. Ici, les nationaux n'ont pas à rougir de la comparaison avec les entraîneurs venus d'Europe. Sur le terrain, dans les choix tactiques, on ne fait pas la différence. Si les dirigeants respectaient leurs propres entraîneurs, tout irait beaucoup mieux.
Il y a toujours une sorte de complexe.
Ce que je crois, c'est que le foot africain manque plus de DTN que d'entraîneurs. Et qu'il faudrait solliciter des concours extérieurs précisément pour organiser le football à l'intérieur des pays. Comme cela a été réalisé en France à partir des années 70 par Georges Boulogne. On fera le bilan sur le site de RFI à la fin du tournoi.

A quand les buts sur le site RFI ?

Nous avions emporté tout le matériel pour diffuser sur le site environ quinze secondes sur chacun des buts inscrits pendant la compétition. Nous pensions apporter un véritable plus à tous ceux, nombreux de par le monde, qui ne peuvent voir les images à la télévision. La CAF nous avait donné son accord, mais les droits audiovisuels ayant été vendus au groupe JC.Darmon, les représentants de cette société nous ont demandé 2.500 dollars par minute diffusée, soit le même tarif que pour une chaîne de télévision. Le budget de RFI n'est pas extensible. Nous ne pouvions nous soumettre à de telles conditions.
J'en suis vraiment désolé. RFI s'efforce de donner satisfaction à tous les amoureux du football africain. Nous travaillons au développement de ce football depuis plus de trente ans. Le foot aujourd'hui est un marché. Les marchands du temple font la loi et, dorénavant, les hommes de médias sont considérés comme de simples clients. Tu veux travailler, tu payes…
Pour la première fois, les radios doivent acquitter des droits pour être autorisées à transmettre leurs reportages à la CAN comme à la Coupe du Monde. Le droit à l'information est de plus en plus bafoué au détriment des lecteurs, des auditeurs et des téléspectateurs.

Les réponses du 22 janvier 2002

Les réponses du 7 janvier 2002