Cette CAN au Ghana s’est donc achevée avec une sixième victoire – la seconde d’affilée – des Egyptiens. Si tout n’a pas été parfait durant la XXVIème Coupe d’Afrique des nations, cette édition 2008 a redonné des couleurs à une compétition en perte de vigueur.

Explosion de joie égyptienne à Accra.
(Photo : Reuters)

La victoire de l’Egypte, une victoire de l’Afrique
Ahmed Hassan, pharaon des pharaons, a logiquement brandi la Coupe dans le ciel d’Accra, ce 10 février 2008. Logiquement, car l’Egypte a été la meilleure équipe de bout en bout durant cette CAN. Développant un jeu offensif aussi flamboyant que rigoureux, un football confinant parfois à l’arrogance et la suffisance, les Egyptiens ont écœuré leurs adversaires.

Hosni, meilleur joueur de la CAN et Moteab (à droite) jouent tous deux dans le championnat égyptien.
(Photo : Pierre René-Worms/RFI)

Malgré un quart de final délicat face à l’Angola, aucun adversaire n’a pu résoudre l’énigme venue du Nil.
Il y a matière à se réjouir d’un tel succès. Car cette victoire est aussi celle de l’Afrique. En effet, sur 23 joueurs, 15 évoluent dans le championnat égyptien. Et les hommes d’Hassan Shehata ont fait exploser le Cameroun (4-2 puis 1-0) et la Côte d’Ivoire (4-1) qui comportent les plus forts contingents de joueurs « européens ». Preuve est faite que la réussite ne passe pas forcément par l’expatriation mais plutôt par une organisation rigoureuse et intelligente. Ce qui est justement la marque de fabrique des clubs égyptiens.

Un dernier carré de rêve
Autre satisfaction, la présence de la plupart des nations phares du continent durant cette phase finale. Avec, dans le dernier carré, quatre beaux représentants, ayant remporté 15 des 26 CAN.
L’Egypte donc, qui aura à cœur de retrouver la Coupe du Monde en 2010, en Afrique du Sud, après 20 années de disette. Le Cameroun ensuite, dont on pourrait rebaptiser les représentants « Lions Insondables » tant ils ont dérouté les observateurs par la fragilité de leur jeu, mais leur incroyable réalisme allié à leur traditionnelle force mentale.

Michael Essien conduit les siens à la victoire
( Photo : P.René-Worms/RFI )

Puis, le Ghana qui a sauvé l’honneur en arrachant la troisième place de « sa » CAN. Les Black Stars, généreux et disposant d’une belle équipe, se sont toutefois montrés trop limités offensivement pour triompher chez eux.
Enfin, la Côte d’Ivoire complète le quatuor. Les Eléphants, grands favoris, ont sombré par le jeu. Preuve qu’une somme d’individualités, même animées des meilleurs intentions et aussi fortes soient-elles, ne remplaceront jamais totalement une animation collective intelligente…

Peu de surprises, des déceptions
Pour le reste, la compétition n’a pas beaucoup bousculé la hiérarchie, ni créé de réelles surprises.
Cette CAN 2008 aura surtout confirmé les tendances. A savoir, une jeune Tunisie toujours bien en place et en pleine préparation des prochaines échéances. Un Angola en train de devenir une place forte du football africain après sa participation au Mondial 2006 et avant d’organiser la CAN 2010. Un Nigeria dont on peut raisonnablement penser que l’âge d’or est passé. Une Guinée jeune et généreuse mais encore trop inconstante pour franchir le cap des quarts de finale.
Concernant les éliminés du 1^er Tour, la Zambie et dans une moindre mesure, la Namibie et le Bénin ont laissé une bonne impression. Le Soudan, classé dernier de la Coupe par la CAF n’aura pas été l’outsider attendu, développant un football d’une étonnante naïveté. Le Maroc et le Sénégal ont confirmé leur déclin de ces dernières années malgré un réservoir de talents évident. Le Mali a déçu les observateurs qui l'ont classés parmi les favoris. Enfin, l’Afrique du Sud a confirmé qu’elle entame seulement sa reconstruction après des années de déclin…

L'Angolais Manucho, auteur de quatre buts durant cette CAN.
(Photo : Pierre René-Worms/RFI)

Un festival de buts
Peu de surprises donc, mais une satisfaction avec le nombre de buts inscrits : 99 en 32 matchs ! Soit plus de trois par rencontre, en moyenne. A titre de comparaison, 70 buts ont été inscrits durant le premier tour contre 71 pour l’ensemble de la CAN 2006, en Egypte. Faut-il y voir un renouveau du football offensif ou le signe d'un laxisme tactique de certaines équipes ? Sans doute un peu des deux...
Il convient aussi de remercier l’équipementier pour son ballon « Wawa Aba » au design douteux, mais à l’ergonomie et aux trajectoires insolubles pour les gardiens de buts. Ainsi, près d’un but sur deux a été marqué sur une frappe en-dehors de la surface. Les attaquants se sont régalés. Les portiers, hormis Essam El Hadary et Carlos Kameni, seuls à la hauteur de l’événement, ont souffert…

Une organisation cahotante
Tout n’a pas été parfait, loin de là, au Ghana. Et pas qu’au Ghana d’ailleurs… Le fait négatif de cette CAN 2008 a été la polémique engendrée par l’attribution du Ballon d’or à Frédéric Kanouté plutôt qu’à un Didier Drogba durant la cérémonie au Togo. En organisant sa remise des trophées à Lomé, en pleine compétition, pour de sombres histoires de rivalité entre des opérateurs de téléphonie mobile (sponsors des deux événements), la CAF a confirmé que l’argent – nerf de la guerre, certes – devenait de plus en plus une fin, plutôt qu’un moyen de faire progresser le football africain… Pour le reste, le Ghana ne s'est guère distingué par son sens de l’organisation. Les médias ont été en partie les victimes du

La fièvre ghanéenne.
(Photo : Pierre René-Worms/RFI)

manque de professionnalisme du LOC, ne pouvant pas toujours assurer convenablement le suivi d’une fête dont ont été déjà privés des millions d’Africains du fait de la flambée des droits de retransmission télévisée de la CAN. Les spectateurs sur place, en revanche, ont plutôt bien profité du spectacle avec un taux de fréquentation des stades satisfaisant. Et contrairement à 2006, les enceintes n’ont pas été comblées par des militaires en survêtements…

De bon augure pour 2010
Des stars à foison, un beau vainqueur, beaucoup de buts et une ambiance joyeuse ont fait de cette CAN 2008 une belle fête du football. De bon augure pour 2010, année de l’Afrique. Car dans deux ans, le continent goutera aux joies d’une édition prometteuse en Angola et, surtout, d’une première Coupe du Monde, organisée en Afrique du Sud…