par Dominique Raizon
Article publié le 09/04/2007 Dernière mise à jour le 09/04/2007 à 10:39 TU
Un geste de la main pour la chasser, une moue de dégoût quand on la voit se poser sur la tartine de confiture : la mouche suscite davantage de répulsion que de sympathie. «La» mouche ? Le grand public n’en connaît, en général, que cinq à six espèces, mais mouches, moustiques, mouchettes et moucherons (d’autres espèces de mouches et non pas des bébés mouches) représentent, en fait, à eux seuls, entre 15% et 20% des espèces animales qui vivent sur terre.
Mouche de mai, mouche à miel, mouche à feu, mouche de bœuf, mouche pisseuse, mouche à merde, mouche verte, mouche bleue, mouche dorée, mouche à damiers, mouche des pluies, mouche de l’olive, de l’oignon, de la betterave… Un véritable inventaire, comparable à celui du poète Jacques Prévert. Le terme de «mouche» désigne principalement des insectes volants, ayant une seule paire d’ailes et classés parmi l'ordre des diptères. «La deuxième paire d’ailes, habituellement présente chez les insectes, a régressé chez [les diptères] pour se transformer en une paire de petits organes en formes d’haltères à l’arrière des ailes, assurant la stabilité du vol», explique le chercheur Christophe Daugeron, du Muséum national d’histoire naturelle. Quelque 134 000 espèces de mouches sont recensées actuellement dans le monde, mais les scientifiques estiment qu’il en existe probablement beaucoup d’autres, non encore identifiées.
La mouche tsé-tsé transmet la maladie du sommeil, les moustiques transmettent le paludisme, la dengue, la fièvre jaune, le choléra, etc. Certains diptères, mangeurs de chair animale et buveurs de sang chaud, sont vecteurs de maladies qui tuent chaque année des millions de personnes. D’autres, en revanche, jouent un rôle extraordinaire dans la fertilité de la terre qui nourrit les hommes : ce sont les «phytophages», qui se nourrissent de matières végétales, et les «saprophages», qui décomposent et recyclent les déchets. «Quand on voit des mouches, on peut dire : ça été des vers. Quand on voit des hommes, on peut dire ça en sera», écrivait Raymond Queneau dans Foutaises (1944).
Utiles ou nuisibles, les mouches ? Impossible de trancher de manière aussi absolue. Quand certaines larves de mouches sont capables de dévorer un cadavre d’animal, d’autres comme les asticots de la mouche verte, nettoient des plaies d’humains. Les mouches remplissent, en quelque sorte, un rôle «d’éboueur». Un rôle fondamental dans les écosystèmes. Elles colonisent, mangent et sont mangées. Sans elles, quantité de leurs prédateurs, oiseaux, reptiles, amphibiens, batraciens, poissons, par exemple, eux-mêmes ayant un rôle important dans la chaîne alimentaire qui nourrit les hommes, disparaîtraient.
La doyenne des mouches fossile a 240 millions d’années
Dans l’Antiquité, la mouche était considérée, par les Grecs, comme fille de Zeus. Dans la mythologie des Indiens Navajos (Amérique centrale), la mouche est également messagère des dieux. Mais, globalement, cet insecte n’est pas très bien apprécié par les hommes. Velue, pattes griffues, elle souille les habitations, passe de la bouse de vache au petit pot de beurre, grésille dans la maison quand on cherche le repos, ravage quelquefois les cultures du potager (la redoutable mouche des fruits), parasite le bétail et mord les hommes (le taon des pluies).
Et les hommes la chasse depuis la nuit des temps
Mais la mouche, contrairement aux dinosaures, s’est adaptée à travers les âges. Ainsi, la plus ancienne mouche fossile connue, la Grauvogelia arzvilleriana, est âgée de 240 millions d’années. La plupart des grandes lignées d’insectes ont d’ailleurs survécu aux bouleversements géologiques de notre planète depuis 125 millions d’années.
Démarrer à 60 km/heure et atterrir la tête en bas au plafond !
Ce monde grouillant des diptères passionne les scientifiques. «A chaque fois qu’il y a un litige, lors de la découverte d’une nouvelle espèce, il faut aller se référer à l’holotype», c’est-à-dire au spécimen étalon à partir duquel a été décrite une espèce nouvelle, explique Christophe Daugeron. «La détermination de l’espèce se fait encore, le plus souvent, selon des critères morphologiques, l’examen de l’appareil génital des mâles se révélant souvent la méthode la plus rapide d’identification», relève le chercheur.
Autrement dit, «parce que quelques centaines d’espèces nous posent problème, nous ne pouvons pas en condamner des centaines de milliers d’autres», souligne le scientifique. En génétique par exemple, l’étude de la drosophile, une petite mouche rousse aux yeux rouges, a permis de faire d’immenses progrès, depuis un siècle, dans la compréhension de la transmission des caractères héréditaires. Les chercheurs n’ont pas fini d’interroger les 134 000 espèces de minuscules bestioles aux corps couvert de capteurs sensoriels sophistiqués, équipés de systèmes de déplacement qui relèvent de la très haute technologie, à raison de 300 battements par seconde pour la mouche domestique, 600 pour les moustiques et 1 000 pour une autre. Qu’est-ce qui est capable de faire un démarrage à 60 kilomètres heure et d’atterrir au plafond la tête en bas ? Une mouche.
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