Indonésie
Les civils en première ligne à Aceh
Une bombe a explosé le soir du nouvel an lors d'un concert sur un marché bondé de la province indonésienne d'Aceh, tuant dix personnes, dont trois enfants. Cet attentat est le dernier épisode de la guerre que se livre l’armée indonésienne et les séparatistes du Gam. Un conflit dont la population civile demeure la principale victime.
De notre correspondant à Jakarta.
La bombe a explosé peu avant minuit sur le marché nocturne de Pereulak, une ville de l'est d'Aceh. L'explosion est due à une bombe installée sous une scène où des musiciens jouaient pour le nouvel an. Un porte-parole de l'armée a imputé l'attentat aux séparatistes du Gam qui luttent depuis 27 ans pour l'indépendance de cette province riche en pétrole et contre lesquels Jakarta a lancé une vaste offensive en mai 2003. Le concert était organisée par l’armée qui organise régulièrement des manifestations culturelles pour «reconquérir les cœurs et les esprits» de la population civile.
Tout semble donc accuser le Gam qui pourrait avoir commis cet attentat pour punir les civils «collaborant» à cette exercice de propagande indonésienne. Mais les rebelles ont démenti toute implication. «Nous n'avons jamais commis d'attentat contre notre peuple», explique un porte-parole du Gam qui accuse Jakarta d’avoir organisé l’attentat pour mieux décrédibiliser la cause indépendantiste. Chaque camp se renvoie donc la responsabilité de l’attentat dont les circonstances seront difficiles à éclaircir en raison des restrictions imposées par la loi martiale. La presse étrangère et les ONG sont exclues de la province et les journalistes indonésiens sont soumis à d’énormes pressions qu’ils payent parfois au prix fort.
Ersa Siregar, reporter pour la chaîne de télévision RCTI, a été retrouvé mort, le 29 décembre après un échange de tirs entre des indépendantistes et des militaires. Ersa Siregar avait été pris en otage en juin dernier par des rebelles qui l’accusaient d’«espionnage». En décembre, la Fédération internationale des journalistes (FIJ) avait demandé au gouvernement d'autoriser une délégation de la Croix-Rouge de se rendre à Aceh afin de finaliser la libération des reporters. Selon la FIJ, le GAM avait donné son accord mais l’armée s’était opposée à la venue de cette délégation. La FIJ dénonce aujourd’hui les pressions exercées sur les médias indonésiens pour qu’ils fassent preuve de nationalisme dans la couverture du conflit et qui les exposent ainsi aux vengeances des indépendantistes.
A quelques mois des élections Jakarta manifeste un nationalisme inflexible
Depuis mai 2003, la province s’est installée dans une guerre d’usure. Malgré ses 40 000 hommes déployés sur le terrain, l’armée ne parvient pas à venir à bout des 5000 séparatistes, éparpillés dans la jungle et rompus aux tactiques de guérilla. Comme souvent en pareil cas, c’est la population civile qui paye le plus lourd tribut au conflit avec au moins 500 victimes en huit mois. Les organisations de défenses des droits de l’homme s’alarment des nombreuses exactions, atteintes aux droits de l’homme ou éliminations extrajudiciaires qui sont rapportées mais dont la vérification est rendue pratiquement impossible par la loi martiale.
Les combats et ratissages ont provoqué des déplacements de populations, regroupées dans des camps, soumises à des conditions précaires. Jusqu’à
120 000 civils ont été déplacés, au gré des opérations dans les villages et pour des périodes plus ou moins longues. Quelques 9000 réfugiés sont actuellement enregistrés dans les camps «officiels» tandis qu’un nombre indéterminé, mais sans doute important de civils sont réfugiés dans la jungle ou chez des proches.
Mais, à quelques mois des élections générales, le gouvernement de Megawati Sukarnopruti entend démontrer un engagement nationaliste inflexible sur une question qui ne soulève guère d’opposition dans le reste du pays et la classe politique. Plus que jamais, l’unité de l’Indonésie est érigée en dogme intangible et sa défense est laissée à la charge des militaires, ce qui ne laisse aucune place à la négociation pour sortir du conflit. Considéré comme un mouvement terroriste, le Gam n’est pas un interlocuteur pour Jakarta et ses négociateurs ont été condamnés à de lourdes peines de prison. Les réactions de la communauté internationale appelant à une levée rapide de la loi martiale, ont été dénoncées comme des «ingérences» par Jakarta.
La bombe a explosé peu avant minuit sur le marché nocturne de Pereulak, une ville de l'est d'Aceh. L'explosion est due à une bombe installée sous une scène où des musiciens jouaient pour le nouvel an. Un porte-parole de l'armée a imputé l'attentat aux séparatistes du Gam qui luttent depuis 27 ans pour l'indépendance de cette province riche en pétrole et contre lesquels Jakarta a lancé une vaste offensive en mai 2003. Le concert était organisée par l’armée qui organise régulièrement des manifestations culturelles pour «reconquérir les cœurs et les esprits» de la population civile.
Tout semble donc accuser le Gam qui pourrait avoir commis cet attentat pour punir les civils «collaborant» à cette exercice de propagande indonésienne. Mais les rebelles ont démenti toute implication. «Nous n'avons jamais commis d'attentat contre notre peuple», explique un porte-parole du Gam qui accuse Jakarta d’avoir organisé l’attentat pour mieux décrédibiliser la cause indépendantiste. Chaque camp se renvoie donc la responsabilité de l’attentat dont les circonstances seront difficiles à éclaircir en raison des restrictions imposées par la loi martiale. La presse étrangère et les ONG sont exclues de la province et les journalistes indonésiens sont soumis à d’énormes pressions qu’ils payent parfois au prix fort.
Ersa Siregar, reporter pour la chaîne de télévision RCTI, a été retrouvé mort, le 29 décembre après un échange de tirs entre des indépendantistes et des militaires. Ersa Siregar avait été pris en otage en juin dernier par des rebelles qui l’accusaient d’«espionnage». En décembre, la Fédération internationale des journalistes (FIJ) avait demandé au gouvernement d'autoriser une délégation de la Croix-Rouge de se rendre à Aceh afin de finaliser la libération des reporters. Selon la FIJ, le GAM avait donné son accord mais l’armée s’était opposée à la venue de cette délégation. La FIJ dénonce aujourd’hui les pressions exercées sur les médias indonésiens pour qu’ils fassent preuve de nationalisme dans la couverture du conflit et qui les exposent ainsi aux vengeances des indépendantistes.
A quelques mois des élections Jakarta manifeste un nationalisme inflexible
Depuis mai 2003, la province s’est installée dans une guerre d’usure. Malgré ses 40 000 hommes déployés sur le terrain, l’armée ne parvient pas à venir à bout des 5000 séparatistes, éparpillés dans la jungle et rompus aux tactiques de guérilla. Comme souvent en pareil cas, c’est la population civile qui paye le plus lourd tribut au conflit avec au moins 500 victimes en huit mois. Les organisations de défenses des droits de l’homme s’alarment des nombreuses exactions, atteintes aux droits de l’homme ou éliminations extrajudiciaires qui sont rapportées mais dont la vérification est rendue pratiquement impossible par la loi martiale.
Les combats et ratissages ont provoqué des déplacements de populations, regroupées dans des camps, soumises à des conditions précaires. Jusqu’à
120 000 civils ont été déplacés, au gré des opérations dans les villages et pour des périodes plus ou moins longues. Quelques 9000 réfugiés sont actuellement enregistrés dans les camps «officiels» tandis qu’un nombre indéterminé, mais sans doute important de civils sont réfugiés dans la jungle ou chez des proches.
Mais, à quelques mois des élections générales, le gouvernement de Megawati Sukarnopruti entend démontrer un engagement nationaliste inflexible sur une question qui ne soulève guère d’opposition dans le reste du pays et la classe politique. Plus que jamais, l’unité de l’Indonésie est érigée en dogme intangible et sa défense est laissée à la charge des militaires, ce qui ne laisse aucune place à la négociation pour sortir du conflit. Considéré comme un mouvement terroriste, le Gam n’est pas un interlocuteur pour Jakarta et ses négociateurs ont été condamnés à de lourdes peines de prison. Les réactions de la communauté internationale appelant à une levée rapide de la loi martiale, ont été dénoncées comme des «ingérences» par Jakarta.
par Jocelyn Grange
Article publié le 02/01/2004